Les Britanniques ont voté ce jeudi pour le changement, spectaculairement, en portant triomphalement au pouvoir le parti travailliste. Après quatorze années dans l’opposition, le Labour remporte la majorité absolue avec 410 sièges, selon les estimations sorties des urnes, publiées à 22 heures locales (23 heures à Paris) et généralement extrêmement fiables. Vendredi 5 juillet, le roi Charles III demandera au chef du parti, Keir Starmer, de devenir le deuxième Premier ministre de son règne. Et une page de l’histoire britannique se tournera.
Sur le réseau social X, Keir Starmer est resté fidèle à sa personnalité sobre et peu démonstrative en postant un message très simple : «à tous ceux qui ont fait campagne pour le Labour dans cette élection, à tous ceux qui ont voté pour nous et placé leur confiance dans notre parti du Labour transformé - merci».
Les conservateurs sont balayés et ne remporteraient que 131 sièges, soit une perte de 241 sièges, alors que les Libéraux-démocrates, après une campagne extrêmement débridée de leur leader Ed Davey, opèrent une formidable percée avec une estimation de 61 sièges, soit un gain de 53 sièges ! Il s’agirait pour les tories, si les résultats définitifs sont conformes à ces sondages, de la pire défaite de sa longue histoire. Le parti conservateur, fondé en 1834, est le plus vieux parti du Royaume-Uni et celui qui a le plus souvent gouverné.
Petite surprise, le nouveau parti d’extrême droite Reform gagnerait quelque 13 sièges, selon les estimations, dont probablement celui de Nigel Farage, mauvais génie du Brexit qui, à sa huitième tentative, obtiendrait enfin un siège de député à la Chambre des Communes. Ce parti a probablement largement marché sur les plate-bandes des conservateurs. En revanche, le Scottish National Party (SNP), le parti indépendantiste écossais, serait balayé, avec seulement 10 sièges, contre 43 dans le parlement précédent. Le parti travailliste devrait reprendre largement pied en Ecosse, d’où est originaire l’un de ses fondateurs, Keir Hardie, en 1918. Les Green (écologistes) obtiendraient deux sièges (plus un) et le parti gallois Plaid Cymru, quatre (plus deux sièges).
Moins 230 sièges pour les conservateurs
Quelque 46,5 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes ce jeudi pour élire leurs 650 députés, selon un mode de scrutin uninominal à un tour (first past the post), qui signifie que le candidat qui remporte le plus de voix, quel que soit son score, remporte la circonscription. Il faudra attendre plus tard dans la nuit, voire vendredi matin, pour connaître l’ampleur exacte des résultats. La majorité absolue à la Chambre des Communes, Chambre basse du Parlement, qui compte 650 sièges, est de 326. Lors des dernières élections, en décembre 2019, les conservateurs menés par Boris Johnson avaient remporté 365 sièges, un résultat alors considéré comme un triomphe, et le Labour, 203. En moins de quatre ans, Keir Starmer a réussi à totalement renverser la tendance.
Le dernier Premier ministre travailliste au Royaume-Uni fut Gordon Brown, qui avait succédé à Tony Blair en 2007, sans élection, jusqu’en 2010. En mai 1997, Tony Blair avait remporté une victoire éclatante avec 418 sièges, succédant à John Major, après 18 ans de conservatisme.
L’élection de ce jeudi met un terme à une nouvelle ère de quatorze années de conservatisme, où le Royaume-Uni a opéré un choix drastique dans son histoire en décidant de quitter l’Union européenne, après un référendum en juin 2016. Huit ans plus tard, les Britanniques ne sont plus que 30 % à considérer que ce fut une bonne idée. Entre-temps, les bénéfices promis ne se sont jamais concrétisés : l’économie britannique est aujourd’hui à la traîne derrière celle de l’UE, les services publics décimés, les villes en faillite, le niveau de pauvreté en hausse – notamment celui des enfants, le plus élevé parmi tous les pays développés selon l’Unicef. Et, à l’international, le statut du Royaume-Uni a singulièrement pâli.
Mis à jour le 04/07/2024 à 23h55 avec nouveaux éléments de contexte, déclarations de Keir Starmer