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Après Merkel

En Allemagne, les Verts penchent pour le social-démocrate Olaf Scholz

Elections en Allemagnedossier
Faiseurs de roi pour choisir le successeur d’Angela Merkel, les Verts et les libéraux vont entamer ce jeudi des discussions avec les sociaux-démocrates, arrivés en tête des législatives du 26 septembre. Mais le conservateur Armin Laschet reste en embuscade.
Olaf Scholz à Berlin, le 29 septembre. (Michael Kappeler/AP)
par Christophe Bourdoiseau, correspondant à Berlin
publié le 6 octobre 2021 à 16h33

Les écologistes allemands ont mis un grand coup d’accélérateur pour la formation du gouvernement de l’après-Merkel. En réussissant à organiser ce jeudi une première consultation à trois (Sondierung), Die Grünen (les Verts) ont choisi une option sérieuse pour participer à une coalition comprenant les libéraux du FDP et le social-démocrate Olaf Scholz (SPD) comme chancelier.

Cette constellation politique, plus populaire selon les sondages, semble actuellement la plus vraisemblable étant donné la situation désespérée de la droite allemande avec laquelle plus personne ne veut parler. Malgré leurs différences, les trois vainqueurs des élections se rejoignent en effet sur un point : la volonté de changement.

Mais après les intentions, il va falloir parler contenu. «Nous allons devoir maintenant étudier les points qui nous rapprochent», a insisté Christian Lindner, le président du FDP. Après quelques rencontres informelles, les négociateurs vont devoir en effet entrer dans les détails avec de pouvoir définir un contrat de coalition. Un «ménage à trois», c’est une première en Allemagne au niveau fédéral. «On n’est pas encore sorti de l’auberge», a rappelé le coprésident des Verts, Robert Habeck. «Nos positions sont très différentes [avec le SPD et les Verts]. Cela va exiger beaucoup de fantaisie», a répondu Christian Lindner.

Couleuvres à avaler

Le dossier de la fiscalité promet notamment de longues et difficiles négociations avec les libéraux. Christian Lindner n’est pas du tout sur la même longueur d’onde que les Verts sur les impôts, la discipline budgétaire et le «frein à la dette». Son parti, clientéliste par essence, ne veut pas entendre parler d’un retour de l’impôt sur la fortune ou d’une plus grande pression fiscale pour les hauts revenus. «Avec nous au gouvernement, il n’y aura pas d’augmentation d’impôts», avait prévenu Christian Lindner pendant la campagne. Une revendication qu’il entend bien imposer aux Verts et au SPD, alors qu’il revendique en coulisses le portefeuille des Finances. Par ailleurs, les libéraux sont opposés à la suppression du frein à la dette, inscrit dans la Constitution, mais aussi à la mutualisation des dettes en Europe.

Les Verts devront donc avaler quelques couleuvres pour être en mesure de former un gouvernement avec eux. En déclarant que la limitation de la vitesse sur les autoroutes allemandes (une des principales revendications des Verts) n’était pas une condition sine qua non aux négociations, le coprésident du groupe parlementaire des écologistes Anton Hofreiter a pu déjà mesurer la grogne parmi les militants.

Pour arriver en position de force à la table des négociations, les deux «faiseurs de roi» n’ont pas abandonné pour autant l’option d’un chancelier conservateur (CDU). «Notre discussion à trois ne signifie en aucun cas le rejet définitif d’une coalition avec la CDU. Les conservateurs ont fait beaucoup d’efforts», a insisté Robert Habeck.

Laschet toujours disponible

«Nous avons beaucoup de points communs avec les conservateurs, a rappelé pour sa part Christian Lindner, qui n’a jamais caché sa préférence pour une alliance ancrée à droite. Cela reste une option solide. Notre objectif est d’aller là où l’on peut mettre le plus en pratique une politique libérale.» Les écologistes n’ont pas oublié qu’en 2017, il avait fait capoter les négociations de coalition en claquant la porte à la dernière minute. «Mieux vaut ne pas gouverner plutôt que de mal gouverner», avait alors déclaré Lindner.

En cas d’échec des discussions avec le SPD, le conservateur Armin Laschet, arrivé en seconde position lors du scrutin de fin septembre, se dit toujours disponible. Cela dit, les luttes de pouvoir et les attaques de ses rivaux internes, prétendants à sa succession, l’ont beaucoup affaibli. Si l’impopulaire Armin Laschet s’accroche, c’est parce que c’est la seule chance pour lui de survivre politiquement au désastre électoral du 26 septembre.

Ses chances d’être élu chancelier s’amoindrissent de jour en jour. Pour son principal détracteur, les jeux sont faits. En engageant des discussions avec le SPD, les libéraux et les écologistes ont «clairement refusé une alliance avec nous», a insisté mercredi Markus Söder. Le patron de Bavière n’a toujours pas digéré d’avoir été privé de l’investiture par la CDU, alors qu’il était beaucoup plus populaire que Laschet.