En résumé :
- Le ministre de la Défense polonais, Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, a annoncé ce mercredi 10 septembre au matin que l’aviation avait tiré contre des drones «hostiles» après des «violations» de son espace aérien.
- La défense antiaérienne de l’Otan a aidé à contrer «plusieurs» de ces drones dans la nuit de mardi à mercredi, a affirmé la porte-parole de l’Alliance atlantique, Allison Hart. Au total, sept aéronefs «Shahed» de fabrication iranienne ont été retrouvés, principalement dans la région de Lublin, à l’est du pays.
- La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui s’exprimait ce mercredi matin devant les eurodéputés à Strasbourg sur l’accord commercial avec Donald Trump. Elle a dénoncé, comme la plupart des dirigeants des Vingt-Sept, une violation «dangereuse» et «sans précédent» du ciel européen.
Le survol du pays par des engins kamikazes ce mercredi 10 septembre constitue un dangereux précédent, qui risque de devenir de plus en plus récurrent si les Européens et l’Alliance atlantique n’apportent pas immédiatement une réponse à la hauteur. L’article de Stéphane Siohan, notre correspondant à Kyiv, à lire par ici.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky regrette la passivité des dirigeants occidentaux après l’incursion de drones russes en Pologne. «Les déclarations ont été nombreuses, mais jusqu’à présent, il y a un manque d’action», a déclaré Zelensky dans son adresse quotidienne, estimant que «la Russie n’a pas reçu de réponse ferme [...], une réponse qui se traduirait par des mesures concrètes».
Le secrétaire général de l’ONU António Guterres met en garde contre le «risque réel» d’une extension du conflit ukrainien au-delà de ses frontières, après l’interception de drones russes sur le territoire polonais. Cet épisode «souligne à nouveau l’impact régional et le risque réel d’expansion de ce conflit dévastateur», a déclaré le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Stéphane Dujarric.
Donald Trump a noté la «violation de l’espace aérien polonais» par la Russie dans un message énigmatique, au ton presque désinvolte, publié sur son réseau Truth Social mercredi. «Qu’est-ce qui se passe avec la Russie qui viole l’espace aérien polonais avec des drones? C’est parti!», a écrit le président américain, dans sa première et succincte réaction depuis que l’Otan a aidé à intercepter des drones que les Occidentaux jugent délibérément envoyés dans la nuit par la Russie.
Le ministre polonais des Affaires étrangères est convaincu de l’origine non accidentelle de l’intrusion d’une vingtaine de drones sur le territoire du pays. «Nous n’avons aucun doute sur le fait que ce n’était pas accidentel», a déclaré Radoslaw Sikorski à la presse, dénonçant «un cas d’attaque sans précédent, non seulement sur le territoire de la Pologne, mais aussi sur celui de l’Otan et de l’Union européenne».
La Russie «a mis en danger des vies humaines» en Pologne, «un État membre de l’Otan et de l’UE», accuse le chancelier allemand Friedrich Merz, condamnant fermement ce qu’il qualifie d’«action agressive» de Moscou. «Cette action imprudente s’inscrit dans une longue série de provocations dans la région de la mer Baltique et sur le flanc est de l’Otan», souligne dans un communiqué le chef du gouvernement allemand, qui condamne «dans les termes les plus fermes cette action agressive de la Russie».
Le ministère russe des Affaires étrangères accuse la Pologne de vouloir «aggraver» le conflit en Ukraine en propageant des «mythes» concernant l’intrusion dans l’espace aérien polonais de drones, qui, selon Varsovie, ont été envoyés par la Russie. Dans une déclaration distincte transmise à l’AFP, l’ambassade russe en Pologne affirme que les autorités polonaises ne lui ont pas fourni de «preuves» indiquant que ces drones étaient d’origine russe. «La partie polonaise [...] a accusé de façon totalement infondée la Russie de provocations», ajoute l’ambassade.
Selon Reuters et l’AFP, Donald Trump et la Maison Blanche suivent de près la situation en Pologne après les violations de son espace aérien par des drones. Un responsable américain a indiqué que l’ex-magnat de l’immobilier devait s’entretenir ce mercredi avec son homologue polonais, Karol Nawrocki. Le chef de la diplomatie polonaise, Radek Sikorski, espère de son côté que Donald Trump montrera «que ses paroles sur la sécurité de la Pologne seront suivies d’actes». La semaine dernière, lors de la visite de Karol Nawrocki à Washington, le président américain avait affirmé que les États-Unis pourraient renforcer leur présence militaire en Pologne et réitéré leur engagement à défendre le pays. «Nous avons une relation formidable avec la Pologne», avait-il déclaré, assurant que les États-Unis étaient prêts à maintenir, voire à renforcer, leur présence militaire dans le pays «si Varsovie le souhaite».
Dans une déclaration publiée sur Telegram, le ministère russe de la Défense a confirmé l’attaque de drones contre l’Ukraine la nuit dernière, tout en niant toute intention de frapper la Pologne : «Il n’y avait aucun projet d’attaquer des installations sur le territoire polonais», a-t-il précisé. Il a ajouté que les drones employés avaient une portée maximale de 700 km, rendant improbable leur intrusion sur le territoire voisin. «Néanmoins, nous restons disposés à engager des consultations avec le ministère polonais de la Défense à ce sujet», conclut le communiqué.
La Russie cherche à «tester notre unité», a affirmé la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas «Je pense que ce que Poutine veut montrer, ce qu’il veut vraiment faire, c’est tester jusqu’où il peut aller», a-t-elle également déclaré, à l’occasion d’un entretien avec un petit groupe de journalistes.
Washington fait front avec ses alliés européens. L’ambassadeur américain à l’Otan, Matthew Whitaker, a réaffirmé le soutien de son pays après l’intrusion de drones dans le ciel polonais. «Nous soutenons nos alliés de l’Otan face à ces violations de l’espace aérien et défendrons chaque centimètre du territoire» de l’Alliance, a écrit Matthew Whitaker sur X.
Lors d’un point presse régulier du gouvernement, Sebastian Hille a évoqué le fait que les drones russes «ont manifestement été dirigés» vers la Pologne. «Il s’agit d’un incident très, très sérieux. (...) Cela montre encore une fois à quelle menace nous sommes confrontés et à quel point nous sommes testés par la Russie», s’est en outre exclamé le ministre de la Défense allemand.
«Mon message à Poutine est clair : mettez fin à la guerre en Ukraine (...) cessez de violer notre espace aérien et sachez que nous sommes vigilants et que nous défendrons chaque centimètre du territoire de l’Otan.» Mark Rutte, le secrétaire général de l’Otan, s’est adressé à Vladimir Poutine, blâmant le «comportement dangereux» de la Russie après l’incursion de drones, face à laquelle l’Alliance a selon lui été «très efficace». Une «évaluation complète» est en cours, mais, que cette incursion ait été «intentionnelle ou non, elle est absolument irresponsable, dangereuse», a cinglé le chef de l’Otan devant la presse.
Sommé de réagir aux dires de la Pologne selon lesquels elle avait abattu des drones russes dans son espace aérien, le Kremlin s’est refusé à tout commentaire, affirmant que cette question relevait de la compétence du ministère de la Défense.
Un diplomate russe a contredit mercredi les déclarations européennes selon lesquelles les drones abattus dans le ciel polonais pendant la nuit viendraient de la Russie. «Nous savons une chose : ces drones volaient depuis l’Ukraine», a assuré Andrei Ordash, chargé d’affaires russe à Varsovie, après avoir quitté le ministère polonais des Affaires étrangères.
«Les drones russes en Pologne et les débris chez nos voisins ne sont pas une menace imaginaire, mais une réalité. Ceux qui accusent l’Otan d’agression veulent une République tchèque faible. Nous voulons un pays fort et sûr, c’est pourquoi nous augmentons les dépenses de défense.» Voilà ce qu’a déclaré le Premier ministre tchèque Petr Fiala. Face aux tensions géopolitiques croissantes, Prague prévoit de porter progressivement le budget militaire à 3% du PIB d’ici 2030. Dans ce cadre, le gouvernement a récemment approuvé plusieurs acquisitions majeures pour moderniser ses forces armées : 44 chars Leopard auprès de l’Allemagne pour 1,6 milliard de dollars, 24 avions de combat F-35 américains, et 246 véhicules blindés CV90 suédois, renforçant ainsi la capacité défensive.
Ces incidents interviennent au lendemain d’un avertissement du président polonais, Karol Nawrocki qui, lors d’une visite en Finlande mardi, avait estimé que Vladimir Poutine était prêt à envahir d’autres pays après l’Ukraine. Par ailleurs, en août dernier, Varsovie avait adressé à Moscou une note de protestation après la chute et l’explosion d’un drone dans l’est du pays, qualifiant cet incident de «provocation délibérée».
En 2023, un missile russe avait également traversé l’espace aérien polonais en survolant sa frontière avec l’Ukraine. Et en novembre 2022, un missile de la défense antiaérienne ukrainienne était tombé sur le village polonais de Przewodow, près de la frontière, causant la mort de deux civils.
Selon la presse nationale, une vingtaine de «drones russes» ont survolé la Pologne dans la nuit de mardi à mercredi. Une partie d’entre eux ont été abattus à l’aide d’avions de combat, dont des F-35 néerlandais arrivés le 1er septembre. La localisation des sites de chute se poursuit, principalement dans la région de Lublin, où l’un des drones s’est écrasé sur le toit d’une maison habitée par un couple de personnes âgées, depuis pris en charge par une cellule psychologique. L’état-major a lancé un appel aux habitants : «Si vous trouvez des drones abattus ou leurs fragments, ne les approchez pas, ne les touchez pas et ne les déplacez pas. Ces éléments peuvent rester dangereux et doivent être contrôlés par les patrouilles de déminage.» Au total, sept drones ont été retrouvés.
Au lendemain de la violation russe du ciel polonais, le Premier ministre britannique s’est dit «profondément inquiet». «Il s’agit là d’un acte extrêmement dangereux de la part de la Russie, qui ne fait que nous rappeler le mépris flagrant du président (russe Vladimir) Poutine pour la paix», a accusé pour sa part le dirigeant britannique dans un communiqué, Keir Starmer remercie «les forces de l’Otan et les forces polonaises qui ont réagi rapidement pour protéger l’Alliance».