C’était un des dossiers qui attendait le nouveau gouvernement polonais. Le ministère de la Culture a annoncé ce mercredi 20 décembre avoir licencié l’équipe dirigeante des médias d’Etat, perçus comme les porte-voix du PiS, l’ancien parti au pouvoir. La veille, la nouvelle coalition pro-européenne – sortie victorieuse des législatives du 15 octobre – avait fait adopter une résolution appelant à la restauration de «l’ordre légal, l’impartialité et la crédibilité des médias publics».
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Une démarche vivement dénoncée par les députés du parti Droit et Justice (PiS), qui n’ont pas hésité à évoquer une atteinte au pluralisme des médias. Pour exprimer leur désaccord, les nationalistes populistes polonais ont occupé, dans la nuit de mardi à mercredi, les locaux de la télévision publique TVP. «Il n’y a pas de démocratie sans pluralisme des médias ou sans médias antigouvernementaux forts, et en Pologne, ce sont les médias publics», a fustigé dans la nuit le président du parti conservateur Jaroslaw Kaczynski, aux côtés des protestataires.
Les locaux de la télévision publique occupés
Egalement présent au sit-in, l’ancien Premier ministre Mateusz Morawiecki a dénoncé sur X (anciennement Twitter) des «actions illégales» de la part du ministère de la Culture, qui montrent selon lui «comment les autorités qui sont censées se soucier de l’État de droit le violent à chaque étape». «Ce que nous voyons est le premier pas vers une dictature», a ajouté Morawiecki devant les journalistes. Peu après l’annonce des licenciements ce mercredi, la diffusion régulière de TVP a été suspendue, laissant uniquement le logo de la télévision visible sur les écrans.
Bezprawne działania ministra kultury w odniesieniu do TVP, Polskiego Radia i PAP pokazują jak władza, która rzekomo dba o praworządność łamie ją na każdym kroku. A rządzą tylko tydzień… Nie poddamy się. Nie pozwolimy na budowę dyktatury w Polsce.
— Mateusz Morawiecki (@MorawieckiM) December 20, 2023
Selon l’hebdomadaire polonais Polityka, de nouveaux conseils d’administration ont d’ores et déjà été nommés. La situation, elle, reste tendue aux alentours du bâtiment de TVP, où le PiS a annoncé que l’occupation continuait. A Varsovie, des manifestations de défense des médias publics ont été annoncées pour la soirée.
«Porte-voix de la propagande gouvernementale»
A la tête du pays depuis huit jours, la nouvelle coalition – conduite par Donald Tusk – s’était engagée à réformer les médias publics. Ces derniers s’étaient vus bâillonnés en 2015, après une loi adoptée par le PiS et qui confiait au ministre du Trésor la nomination et la révocation des dirigeants de la télévision et de la radio publique, provoquant l’indignation d’organisations internationales.
Sous le joug du parti conservateur depuis, la télévision publique TVP, la Polskie Radio et l’agence de presse PAP sont régulièrement accusées de présenter des informations biaisées, de transmettre la propagande du précédent gouvernement et de lancer des attaques verbales contre l’opposition. Dans son rapport de 2020, l’organisation Reporters sans frontières (RSF) avait souligné que «le discours partisan et l’incitation à la haine sont toujours la règle dans les médias publics (polonais), qui ont été transformés en porte-voix de la propagande gouvernementale».