Menu
Libération
Minimum syndical

En Russie, des funérailles en catimini pour Mikhaïl Gorbatchev

Les funérailles du dernier dirigeant de l’Union sovétique, Mikhaïl Gorbatchev, ont lieu ce samedi en Russie. Un départ sans grand hommage et sans Vladimir Poutine pour celui dont la mémoire a été chaleureusement saluée à l’international mais pas dans son pays où il est un symbole de déclassement.
La chapelle ardente en hommage à la dépouille de Mikhaïl Gorbatchev à la Maison des syndicats sise à Moscou, le 3 septembre 2022. (Evgenia Novozhenna /AFP)
publié le 3 septembre 2022 à 11h08

Pas de deuil national, ni de grandes funérailles. Mikhaïl Gorbatchev s’en va sans grandes pompes. La cérémonie mortuaire du dernier dirigeant de l’URSS se déroule ce samedi à Moscou, mais Vladimir Poutine n’en sera pas. Une manière de témoigner de l’héritage controversé de Gorby dans son pays. Sa mort à l’âge de 91 ans, survenue mardi 30 août à la suite d’une «longue et grave» maladie, a été plus saluée à l’international que sur ses terres. En Russie, cette figure du XXe siècle, à l’origine des ambitieuses réformes de la perestroïka et de la glasnost, est perçue comme la figure du déclassement et de la crise politique, économique et sociale des années 1990.

Mikhaïl Gorbatchev n’a même pas eu droit à un deuil national comme son successeur et rival, Boris Eltsine, mort en 2007. Le Kremlin se contente de signaler que des «éléments de funérailles nationales» seront présents lors de l’inhumation de l’ancien premier secrétaire, notamment une «garde d’honneur». Et malgré les hommages appuyés de nombreux dirigeants étrangers, aucun ou presque ne sera présent à cause du contexte tendu de la guerre en Ukraine. Seul Viktor Orban, le Premier ministre hongrois, a annoncé qu’il viendrait «rendre hommage», là aussi dans une démarche très politique puisque son pays est le seul du continent à renforcer ses échanges gaziers avec Moscou alors que l’arrêt du gazoduc Nord Stream, crucial pour l’Europe, a été prolongé vendredi 2 septembre.

L’homme qui a précipité malgré lui la chute de l’Union soviétique et la fin de la Guerre froide, prix Nobel de la paix discret en 1990, n’aura donc pas le droit à un hommage appuyé de l’homme fort du Kremlin, officiellement en raison d’un «emploi du temps» chargé. Vladimir Poutine s’est contenté de déposer quelques roses rouges jeudi à l’Hôpital central clinique (TSKB) de Moscou, où est mort Gorbatchev. La veille, et sur un ton neutre qui lui est propre, il avait constaté que Mikhaïl Gorbatchev avait eu «une grande influence sur l’Histoire du monde» et qu’il s’était «efforcé de proposer ses propres solutions aux problèmes». La relation entre les deux hommes était complexe, oscillant entre marques d’estime et reproches mutuels, avant de faire place à une cordiale indifférence.

Rien à voir avec les hommages appuyés des dirigeants occidentaux qui ont salué la mémoire de celui qui a œuvré pour un rapprochement entre l’Est et l’Ouest. Symbole d’une forme de fin de l’histoire qui semble revenir aujourd’hui au galop. Si personne n’a fait le déplacement, le décalage est assez net entre ce que Gorby représente et son départ discret en Russie : l’Allemagne, dont il a permis la réunification là encore malgré lui, a décidé de mettre ses drapeaux en berne ce samedi.

L’ancien dirigeant de l’Union soviétique va tout de même avoir des funérailles en écho à son ancienne fonction. Ses obsèques ont commencé par une cérémonie d’adieu à la Maison des syndicats, un lieu symbolique de la capitale russe où les dépouilles de plusieurs dignitaires communistes ont été exposées, comme celle de Joseph Staline en 1953. et surtout il va être enterré au cimetière de Novodievitchi, à côté de son épouse Raïssa Gorbatchev. Des retrouvailles bienvenues avec son épouse bien aimée dont il était très proche. Il ne s’était jamais vraiment remis de sa mort en 1999. Les voilà enfin réunis.