Malgré la pluie battante sur Belgrade samedi soir, une foule dense se masse en face du Parlement et envahit progressivement le boulevard principal. Jeunes et moins jeunes, on vient en famille ou entre amis, et fleurs à la main. Plus de trois semaines après les deux tueries de masse qui ont fait 18 morts et profondément choqué la Serbie, l’émotion et le deuil se lisent toujours sur les visages, mais la colère pointe. «On marche pour nos enfants qui sont morts, lâche Adrijana, une sexagénaire au bord des larmes sous son parapluie. Maintenant, il faut qu’il s’en aille, on en a assez.» «Il» ? Le président Aleksandar Vucic au pouvoir depuis 2012, qui, depuis la tragédie, est au cœur d’un mouvement de contestation inédit depuis la chute du dictateur Slobodan Milosevic en octobre 2000.
Car pour les dizaines de milliers de personnes qui manifestent chaque semaine à l’appel du mouvement de contestation «La Serbie contre la violence», le lien entre le régime du président national-populiste et la violence meurtrière ne fait aucun doute. C’est l’ensemble d’un système politico-médiati