«La cyberguerre n’aura pas lieu», écrivait en 2011 le chercheur Thomas Rid dans un article au titre un brin provocateur, publié par le Journal of Strategic Studies : la conflictualité informatique, expliquait-il, n’est jamais que la continuation, par de nouveaux moyens, de l’espionnage, du sabotage et de la subversion. «La cyberguerre est arrivée», mais elle ne ressemble pas à ce que beaucoup imaginaient, diagnostiquait le même une décennie plus tard et trois semaines après le début de l’invasion russe en Ukraine, dans une tribune au New York Times : «La confrontation numérique se joue dans l’ombre, aussi discrète qu’insidieuse.» Alors que le fracas des bombes continue de résonner à l’Est de l’Europe, et que les pertes humaines s’accumulent, comment lire la traduction dans le «cinquième milieu» – après la terre, la mer, l’air et l’espace, le cyberespace, selon l’expression consacrée par les doctrines militaires – de ce conflit qui ravage le pays ?
Editorial
A l’opacité qui entoure par nature les cyberattaques – où le plus visible n’est que rarement le plus nuisible, et où pullulent angles morts, faux-semblants et effets gigogne – se superpose la singularité du «brouillard de guerre». Et à la vision, partagée par bien des observateurs, d’une faible efficacité des