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Après un entretien entre Lecornu et son homologue russe, l’Elysée dénonce une «manipulation» de Moscou

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Le ministre français des Armées Sébastien Lecornu s’est entretenu par téléphone avec son homologue russe Sergueï Choïgou, ce mercredi 3 avril pour rappeler «la disponibilité de la France» dans la lutte contre le terrorisme. Le lendemain, Emmanuel Macron a dénoncé une «manipulation de l’information» dans le compte-rendu fait par Moscou.
Sébastien Lecornu, quitte le Palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 6 mars 2024. (Stephane de Sakutin/AFP)
publié le 3 avril 2024 à 19h47
(mis à jour le 4 avril 2024 à 12h41)

C’est une conversation d’importance, tant les entretiens de haut niveau sont rares entre le camp occidental pro-Ukraine et la Russie. Le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, a discuté par téléphone avec son homologue russe, Sergueï Choïgou, ce mercredi 3 avril, une première depuis octobre 2022 a annoncé le ministère français des Armées.

Des dissensions sur la nature des discussions sont immédiatement intervenues dans les communiqués des deux capitales, qui ont aussi évoqué la guerre en Ukraine. En effet, le ministère russe de la Défense a affirmé mercredi soir que les deux pays s’étaient dits «disposés à dialoguer» concernant le conflit en Ukraine. «Le point de départ pourrait être “l’Initiative d’Istanbul pour la paix”», a-t-il ajouté. Des propos, a priori inattendus de la part de la France, immédiatement démentis par Paris. Le ministre russe a bien affirmé «être prêt à reprendre le dialogue sur l’Ukraine» mais «la France n’a accepté ni proposé quoi que ce soit» sur ce sujet, a souligné l’entourage du ministre français.

Condamnation française de «la guerre d’agression» menée par la Russie

Sébastien Lecornu avait plus tôt indiqué dans un communiqué avoir «condamné sans réserve la guerre d’agression que la Russie a lancée en Ukraine» pendant cet appel. Les attaques informationnelles russes semblent se multiplier contre la France alors que Paris a récemment conclu un accord sécuritaire bilatéral avec Kyiv, Moscou dénonçant l’«implication croissante» de Paris dans le conflit.

Concernant l’attentat de Moscou, les positions des deux pays semblaient également marquées mercredi par des lectures opposées des événements. Lecornu a «rappelé la disponibilité de la France» à des «échanges accrus» avec la Russie dans la lutte contre le «terrorisme», selon le communiqué de son ministère. Il a aussi insisté sur le fait que la France «ne disposait d’aucune information permettant d’établir un lien entre cet attentat et l’Ukraine» et a demandé à Moscou de «cesser toute instrumentalisation», au cours d’une conversation d’une heure avec Choïgou. Réponse de Moscou : «le régime de Kyiv ne fait rien sans l’aval de ses superviseurs occidentaux. Nous espérons que, dans ce cas, les services secrets français ne sont pas derrière cela.»

Dès jeudi, Emmanuel Macron a dénoncé des «commentaires baroques et menaçants» des Russes ainsi qu’une «manipulation de l’information» dans le compte-rendu fait par Moscou.

«Coopération accrue»

Le 22 mars, des hommes armés ont pénétré dans une salle de concert avant d’ouvrir le feu sur la foule et de mettre le feu au bâtiment. Au moins 144 personnes sont mortes et 360 ont été blessées dans cette attaque revendiquée par l’Etat islamique (EI). Le Kremlin a admis que des «islamistes radicaux» étaient à l’origine de l’attentat, tout en dénonçant une piste ukrainienne. Douze suspects ont été arrêtés, dont les quatre assaillants présumés, originaires du Tadjikistan.

La branche de l’EI soupçonnée d’être derrière l’attaque de Moscou «avait conduit ces derniers mois plusieurs tentatives» sur le sol français, avait déclaré peu après Emmanuel Macron. «Nous avons proposé aux services russes, comme à nos partenaires de la région, une coopération accrue», avait précisé le président français. Les Etats-Unis avaient pour leur part affirmé avoir prévenu Moscou qu’un attentat était en préparation.

Le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le secrétaire d’Etat Antony Blinken se sont téléphonés pour la dernière fois en avril 2023. La Russie l’envoie régulièrement aux réunions du G20, comme en février 2024, mais rien n’indique qu’il se soit entretenu directement avec des responsables occidentaux. Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou, lui, s’était entretenu avec son homologue américain Lloyd Austin en février 2023.

Mise à jour le 4 avril à 8h18, avec davantage d’éléments, puis à 12h39 avec la déclaration d’Emmanuel Macron.