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Corruption

Espagne : le chef d’une unité de police anti-blanchiment d’argent arrêté, 20 millions d’euros découverts chez lui

Un haut responsable de la police de Madrid a récemment été écroué pour ses liens présumés avec des narcotrafiquants, dans le cadre d’une enquête ayant permis une saisie record de cocaïne.
La saisie record de cocaïne par la police espagnole dans le port d’Algésiras, en Andalousie, le 6 novembre 2024. (Jon Nazca/Reuters)
publié le 13 novembre 2024 à 12h14

Décrit comme discret et travailleur, il dirigeait la prestigieuse unité de lutte contre les délits économiques et fiscaux (UDEF) de la police espagnole à Madrid il y a encore quelques jours. Censé lutter contre les blanchiments d’argent, notamment liés aux trafics de drogue, Óscar Sánchez Gil a, à l’inverse, mis une pièce dans cette machine qu’il devait enrayer.

Le responsable, soupçonné d’être payé pour travailler en étroite collaboration avec des narcotrafiquants depuis au moins cinq ans, a été arrêté «la semaine dernière» avec «quinze autres personnes», dont sa compagne, également fonctionnaire de police dans la région de Madrid, a annoncé mardi 12 novembre à l’AFP une source policière.

Des millions d’euros découverts dans ses murs

Lors de ce coup de filet, 20 millions d’euros en espèces ont été découverts dans les murs et les plafonds de la maison de l’homme âgé d’une quarantaine d’années à Alcalá de Henares, ville de 195 000 habitants située à 30 kilomètres à l’est de Madrid. Au terme de leurs perquisitions, les enquêteurs ont également retrouvé un million d’euros dans son bureau, en coupures de 50 à 500 euros, dissimulées dans deux armoires fermées à clé, selon la même source policière.

A l’issue de leur garde à vue, Óscar Sánchez Gil et son épouse ont été présentés à un juge de l’Audience nationale, juridiction madrilène chargée des affaires pénales les plus graves et complexes. Ce dernier les a mis en examen pour «trafic de drogue», «corruption», «blanchiment d’argent» et «appartenance à une organisation criminelle», et les a placés en détention provisoire, selon une source judiciaire.

Selon les médias espagnols, ces arrestations sont liées à une saisie réalisée le mi-octobre de 13 tonnes de cocaïne dans le port d’Algésiras, en Andalousie (sud), camouflées parmi des bananes dans un conteneur en provenance de l’Equateur. Cette opération, annoncée mercredi dernier, a été présentée par les autorités espagnoles comme «la plus grande saisie de l’histoire du trafic de drogue en Espagne» et «l’une des plus grandes au niveau mondial».

Le conteneur, en provenance du port de Guayaquil, était destiné selon la police «à un importateur espagnol» basé à Alicante (sud-est) «qui recevait depuis des années de grandes quantités de fruits importés de l’Equateur». Après cette saisie, plusieurs domiciles et bureaux ont été perquisitionnés à Madrid et Alicante. Des opérations qui ont permis, selon ces médias, de mettre à jour des liens entre l’importateur et Oscar Sánchez Gil.

Le «Pablo Escobar» espagnol

Les enquêteurs soupçonnent ce haut responsable policier d’avoir réalisé par le passé des «transactions» avec cet importateur, via une entreprise dont il est propriétaire. Durant près de cinq ans, Oscar Sánchez Gil aurait fourni aux trafiquants des informations sur la surveillance des conteneurs dans les ports espagnols, ce qui leur aurait permis d’éviter les contrôles, selon une source proche de l’enquête.

Une partie de l’argent amassé par l’ancien chef de l’unité anti-blanchiment aurait ainsi été blanchie via l’achat de cryptomonnaies et d’une importante flotte de VTC, déclarée au nom d’une de ses proches. Et si son train de vie n’était en rien ostentatoire, les importantes sommes d’argent retrouvées chez Oscar Sánchez Gil ont conduit des policiers, cités par El Mundo, à comparer sa maison «à celle de Pablo Escobar», le célèbre baron de la drogue colombien.