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Dénouement

Espagne : Pedro Sánchez reconduit à la tête du gouvernement dans un pays divisé

Le Premier ministre, au pouvoir depuis 2018, a été reconduit ce jeudi 16 novembre par le Parlement espagnol. A la tête d’une coalition avec l’extrême gauche, le socialiste va devoir apaiser la droite et une partie du pays, en colère depuis qu’il a concédé une loi d’amnistie aux indépendantistes catalans, en échange de leur soutien.
Le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez (à gauche), a été reconduit dans ses fonctions ce jeudi 16 novembre par le Parlement, à Madrid. (Susana Vera/REUTERS)
publié le 16 novembre 2023 à 15h51
(mis à jour le 16 novembre 2023 à 15h51)

C’est fait. Le Premier ministre, Pedro Sánchez, est reconduit ce jeudi 16 novembre par le Parlement à la tête de l’Espagne, pays profondément divisé en raison de sa décision de concéder une loi d’amnistie aux indépendantistes catalans, en échange de leur soutien. Au pouvoir depuis 2018, le socialiste a obtenu les voix de 179 députés après deux jours de débats tendus, un nombre supérieur à la majorité absolue fixée à 176.

Ce vote de confiance met fin à près de quatre mois de blocage depuis les élections législatives du 23 juillet et va permettre à Sánchez de former un nouveau gouvernement avec ses alliés de la coalition d’extrême gauche Sumar.

Arrivé deuxième du scrutin de juillet, derrière son rival conservateur Alberto Núñez Feijóo, le Premier ministre a dû ces dernières semaines négocier tous azimuts le soutien à sa reconduction de plusieurs formations régionalistes, dont les voix sont cruciales dans un Parlement très fragmenté. Il a en particulier dû convaincre le parti de l’indépendantiste catalan Carles Puigdemont, leader de la tentative de sécession de la Catalogne en 2017 avant de fuir en Belgique pour échapper aux poursuites judiciaires lancées à son encontre.

Acceptant, après d’intenses tractations, de soutenir le Premier ministre Sánchez, Carles Puigdemont a obtenu, en échange des voix des sept députés de sa formation, l’adoption prochaine d’une loi d’amnistie pour des centaines d’indépendantistes poursuivis par la justice. Une mesure qui lui permettra de revenir en Espagne.

«Refermer les blessures»

Exposant aux députés les priorités de son nouveau mandat, clairement marqué à gauche avec de nombreuses promesses sociales, Pedro Sánchez a défendu mercredi la nécessité et la constitutionnalité de cette amnistie, à laquelle il était pourtant opposé par le passé. Cette mesure va permettre de «refermer les blessures» ouvertes par la crise de 2017, a affirmé le Premier ministre, qui assure vouloir garantir «l’unité de l’Espagne par la voie du dialogue et du pardon».

Le Parti populaire (PP) d’Alberto Núñez Feijóo accuse le socialiste d’avoir concédé cette loi dans le seul but de se maintenir au pouvoir, affirmant que l’Espagne risque de se retrouver dans le viseur de l’UE, à l’instar de la Hongrie ou de la Pologne, en raison de l’atteinte à l’Etat de droit que constitue, selon lui, cette mesure.

Rejetée, selon plusieurs sondages, par une majorité des Espagnols, cette amnistie a fait descendre dans la rue des centaines de milliers de personnes dimanche, à l’appel du PP. Une nouvelle mobilisation est également prévue samedi à Madrid.

Les rassemblements quotidiens de l’extrême droite, devant le siège du Parti socialiste à Madrid, ont par ailleurs régulièrement dégénéré depuis la semaine dernière. Mercredi soir, 15 personnes ont encore été interpellées pour troubles à l’ordre public après de nouvelles échauffourées avec la police, selon la préfecture. En raison de ces tensions, plus de 1 600 policiers ont été de nouveau déployés ce jeudi autour du Parlement, totalement bouclé depuis mercredi par les forces de l’ordre. Un dispositif équivalent à celui d’un match de football classé à haut risque.