Vent de rupture sur l’exécutif espagnol. Le leader indépendantiste catalan Carles Puigdemont a annoncé lundi 27 octobre que la direction de son parti avait décidé de «rompre» son accord avec les socialistes au pouvoir à Madrid et de cesser d’appuyer le gouvernement de Pedro Sánchez, qui n’a pas de majorité au Parlement.
«Notre projet politique n’a pas pour vocation la stabilité de l’Espagne», a lancé Carles Puigdemont, qui vit toujours en exil à l’étranger pour échapper à la justice espagnole, lors d’une conférence de presse à Perpignan (sud de la France) après une réunion de son parti, Junts per Catalunya (JxCat).
«Pas disposés à continuer d’aider un gouvernement qui n’aide pas la Catalogne»
Il avait auparavant énuméré la liste de ses griefs à l’écart des socialistes au cours des deux dernières années, depuis la conclusion, en novembre 2023, d’un accord de soutien par lequel les sept députés de Junts au Parlement avaient apporté leurs votes à Pedro Sánchez pour qu’il puisse être reconduit au pouvoir.
«Nous ne sommes pas disposés à continuer d’aider un gouvernement qui n’aide pas la Catalogne», a-t-il déclaré. «C’est pourquoi la direction exécutive nationale a décidé de rompre son soutien au parti socialiste, de passer à l’opposition et, évidemment, de consulter les militants» du parti, a-t-il dit. Il a précisé que cette consultation, qui débuterait mercredi à 10 heures locales, s’achèverait jeudi à 18 heures.
Si la base du parti approuve cette décision de rupture, ce qui est probable, le gouvernement espagnol n’aura plus «la majorité de l’investiture», a poursuivi Carles Puigdemont, ajoutant que Pedro Sánchez «n’aura pas de budget, n’aura pas la capacité de gouverner». Le gouvernement de gauche de Pedro Sánchez «pourra occuper des fauteuils, mais il ne pourra pas gouverner», a-t-il encore averti, sommant le parti socialiste de «réfléchir» à cette situation. Pas de soutien, mais pas forcément de censure. Puigdemont n’a pas indiqué si les députés de sa formation voteraient pour renverser le gouvernement de gauche aux côtés de la droite et de l’extrême droite, ce qui entraînerait la convocation d’élections anticipées.
Une amnistie inappliquée
Cette rupture traduit le mécontentement croissant de JxCat vis-à-vis du gouvernement de Pedro Sánchez, que le parti indépendantiste catalan accuse de ne pas avoir tenu ses promesses. Le 9 novembre 2023, après d’intenses tractations, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) était parvenu à arracher le soutien des indépendantistes catalans, permettant ainsi au Premier ministre de rester au pouvoir. En échange de leur vote, JxCat avait obtenu que les socialistes fassent voter par le Parlement une loi d’aministie pour ses dirigeants et militants poursuivis par la justice espagnole pour leur implication dans la tentative de sécession manquée de 2017 en Catalogne.
Une loi d’amnistie avait bien été votée en 2024, d’extrême justesse (177 voix pour une majorité absolue à 176) le PSOE se mettant à dos la droite et l’extrême droite, cette dernière dénonçant «une corruption politique». Mais Carles Puigdemont, qui vit toujours en exil en Belgique et en aurait été le principal bénéficiaire, n’était pas concerné. En effet, la Cour suprême espagnole a refusé d’appliquer l’amnistie au délit de détournement de fonds (il leur est reproché d’avoir utilisé des fonds publics pour l’organisation du référendum du 1er octobre 2017), pour lequel Puigdemont et d’anciens ministres catalans étaient poursuivis.