Les chefs de train Inna Charavskaya et Nazar Gutsak inspectent le wagon vide. Dans quelques heures, les compartiments et les couchettes se rempliront d’enfants et de vieillards, de baluchons rassemblés à la va-vite, de chats, de chiens, et de l’immense tristesse de l’exil. Le train, spécialement équipé pour évacuer les habitants de zones proches du front, est parti de Dnipro mercredi 4 septembre au matin, en direction de Pokrovsk, dans la région de Donetsk. Les Russes ne sont plus qu’à quelques kilomètres de cet important nœud logistique du Donbass.
Inna Charavskaya, 31 ans, et Nazar Gutsak, 39 ans, vivent dans l’ouest de l’Ukraine, relativement épargné par la guerre. Depuis le début de l’invasion russe, en février 2022, ils participent aux évacuations de l’Est du pays. Au début, c’était le chaos, la panique et parfois 300 personnes entassées dans un seul wagon. Mais en deux ans et demi, Ukrzaliznytsia, la société anonyme qui gère les chemins de fer ukrainiens, a mis au point les mécanismes d’évacuation des civils. Aujourd’hui, tout est cohérent, mieux organisé, mais pas moins déchirant.
Une personne qui fuit son domicile, en abandonnant toute sa vie, est en colère contre le monde entier, et souvent les chefs de train sont les premiers à essuyer la rage et le chagrin. «Mais les gens ne pensent souvent pas que nous avons aussi des enfants à la maison. Et nous risquons aussi notre vie», soupire Inna Charavskaya, mère de deux enfants de 8 et 10 ans. Elle ne dit pas toujour