Alors que l’incursion dans la région russe de Koursk et l’occupation de 94 localités a remonté le moral des troupes ukrainiennes et contrarié un peu le Kremlin, elle n’a pas permis, comme escompté, d’alléger la pression sur le front de l’Est, dans le Donbass, où les combats se sont au contraire intensifiés ces derniers jours. L’armée russe, supérieure en nombre et bien équipée, y poursuit son avancée implacable, revendiquant presque tous les jours de nouvelles prises, et grignotant toujours plus de territoire. Jeudi, c’est la localité de Mejové qui est tombée dans l’escarcelle de Moscou, après celles de Jelanné et de New York, dans les jours précédents. D’après les dernières cartes interactives du site ukrainien DeepState, les localités de Kamyshevakha, Zavitne et Novojelanne sont désormais occupées. Les Russes ont également avancé dans cette direction près de Mykolaïvka.
Les troupes ukrainiennes continuent de perdre du terrain. Les commandants militaires, interrogés par l’agence Associated Press, dénoncent la supériorité numérique et technique de l’ennemi, ainsi que leur force de frappe aérienne, mais aussi, dans leurs propres rangs, des recrues mal formées issues de la récente campagne de mobilisation, et un manque de moyens.
En ce 911e jour de la guerre, les Russes ne sont plus qu’à une dizaine de kilomètres de la ville de Pokrovsk, un important nœud logistique dans la région de Donetsk et un verrou sur la route de Tchassiv Iar, Kostiantynivka, et Sloviansk, qui, s’il sautait, compromettrait les capacités défensives et l’approvisionnement de l’armée ukrainienne, et rapprocherait la Russie de son objectif déclaré : s’emparer de la totalité de la région de Donetsk. «La situation évolue et les Russes se rapprochent de plus en plus. Pokrovsk est une plaque tournante très importante, un centre de défense. Si nous perdons Pokrovsk, c’est toute la ligne de front qui s’effondrera», commente l’expert militaire Mikhail Jirokhov à l’antenne de la radio ukrainienne NV.
Depuis une semaine, les autorités locales pressent les civils à quitter la ville, qui compte 53 000 habitants, dont près de 4000 enfants (13 000 avant la guerre). Lundi, le chef de l’administration militaire régionale de Donetsk, Vadym Filachkin, a ordonné «l’évacuation forcée» des familles avec enfants, tandis que Sergey Dobryak, le chef de l’administration militaire de Pokrovsk, a déclaré qu’il restait une ou deux semaines pour évacuer la ville en toute sécurité, compte tenu du rythme de l’avancée de l’armée ennemie. Les habitants de la ville de Myrnohrad (il en reste 16 000, sur une population de 46 000 avant-guerre), à 10 km de Pokrovsk en direction du front, n’auraient quant à eux plus que quelques jours pour se mettre à l’abri.