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Guerre en Ukraine: le flux des réfugiés s’accélère, la moitié des habitants de Kyiv ont fui

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Plus de 2,3 millions de personnes ont franchi les frontières de l’Ukraine en deux semaines, laissant augurer d’une crise humanitaire sans précédent sur le sol européen.
Des réfugiés ukrainiens ce jeudi à Medyka, à la frontière polonaise. (Daniel Cole/AP)
publié le 10 mars 2022 à 17h53

Le chiffre est hautement symbolique. Selon le maire de Kyiv, Vitali Klitschko, la moitié de la population de l’agglomération de la capitale ukrainienne a fui en quinze jours pour échapper aux bombardements de l’armée russe. «Aujourd’hui, un peu moins de deux millions d’habitants s’y trouvent», contre plus de 3,5 avant la guerre, a-t-il expliqué à la télévision. Il a salué le courage de ses administrés ayant fait le choix de rester à Kyiv et qui ont transformé la ville en «forteresse».

Selon le décompte de l’ONU publié ce jeudi, le rythme d’arrivée des réfugiés qui fuient les combats en Ukraine s’est légèrement accéléré ces dernières vingt-quatre heures, plus de 160 000 personnes ayant franchi la frontière. Ce qui porte le total à plus de 2,3 millions de personnes. Les autorités et l’ONU s’attendent à ce que le flot s’intensifie encore, avec les évacuations de certains centres urbains.

La barre symbolique des deux millions a été franchie mardi, seulement douze jours après le début du conflit, faisant dire à Filippo Grandi, le Haut-commissaire aux réfugiés (HCR), que c’est le flux le plus rapide sur le continent européen depuis la Seconde Guerre mondiale.

Selon l’ONU, quatre millions de personnes au total pourraient vouloir quitter le pays pour échapper à la guerre. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a de son côté estimé que l’Europe pouvait s’attendre à recevoir cinq millions d’exilés si le conflit venait à durer.

Avant ce conflit, l’Ukraine était peuplée de plus de 37 millions de personnes dans les territoires contrôlés par Kyiv – qui n’incluent donc pas la Crimée annexée par la Russie, ni les zones sous contrôle des séparatistes prorusses.

Des réfugiés plus démunis

En France, le gouvernement anticipe l’arrivée massive dans les prochaines semaines sur le territoire de 50 000 à 100 000 personnes, un scénario qui nécessite de redimensionner le dispositif d’accueil prévu. A la date de ce jeudi, on comptait environ 7 500 réfugiés arrivés sur le sol français.

Après une «première vague» de personnes fuyant l’Ukraine pour rejoindre «des gens en Europe» car ils y avaient des proches, «nous anticipons une deuxième et une troisième vagues de gens qui seront des réfugiés plus démunis» et qui pourront moins se reposer sur l’hébergement chez leurs proches, a souligné le préfet de la Haute-Marne Joseph Zimet, qui pilote la cellule interministérielle de crise (CIC) sur le sujet, lors d’une conférence de presse au ministère de l’Intérieur.

Ce que l’envoyé spécial de Libération en Pologne confirme. «La semaine dernière, c’était surtout les riches qui fuyaient. Désormais, ce sont les plus pauvres», lui a expliqué un pasteur polonais d’origine camerounaise, bénévole à la gare de Przemysl (en Pologne).

La Pologne accueille à elle seule plus de la moitié de tous les réfugiés qui ont fui depuis le début de l’invasion russe. Au total, 1 412 503 d’entre eux sont présents dans ce pays, selon le décompte du HCR arrêté au 8 mars. Avant cette crise, la Pologne abritait déjà environ 1,5 million d’Ukrainiens venus pour la plupart travailler dans ce pays membre de l’Union européenne.

La Hongrie, elle, accueille 214 160 personnes, soit un peu moins de 10 % du total, selon les mêmes chiffres du HCR arrêtés au 8 mars. Le pays compte cinq postes-frontières avec l’Ukraine et plusieurs villes frontalières, comme Zahony, ont aménagé des bâtiments publics en centres de secours, où des civils hongrois viennent proposer vivres ou assistance. La Slovaquie dénombre 165 199 personnes ayant fui l’Ukraine, selon le point actualisé du HCR arrêté au 9 mars.

Après leur arrivée en Moldavie, petit pays de 2,6 millions d’habitants et l’un des plus pauvres d’Europe, une partie des réfugiés poursuivent leur route jusqu’en Roumanie ou en Hongrie, souvent pour retrouver de la famille. Selon les autorités moldaves, depuis le 24 février, 270 306 personnes sont entrées dans le pays par l’Ukraine et 169 364 sont reparties ailleurs.

En Roumanie, le HCR dénombre 84 671 réfugiés. Comme pour la Moldavie, de nombreux réfugiés décident de poursuivre leur route une fois en sécurité. Le HCR a aussi précisé que 258 844 personnes avaient poursuivi leur route vers d’autres pays européens une fois la frontière ukrainienne franchie.