Deux semaines sont passées et la poussière a eu le temps de retomber. Le bâtiment du 31, boulevard Václav-Havel tient encore, comme un vaisseau abandonné de briques et de ciment qui aurait été tranché en deux par une hache céleste. Dans une partie de la barre d’immeuble, les habitants sont revenus, alors que dans l’autre la structure est trop fragile, des pans d’étages menaçant de s’effondrer. Au milieu, où neuf étages se sont évaporés après l’impact du missile, la cage d’ascenseur baigne absurdement dans la lumière du soir. Ils sont encore nombreux, riverains et passants, à s’arrêter dans la cour, entre les voitures calcinées et l’aire de jeu pour enfants noircie, pour repenser en silence à ce matin du 17 juin, à l’issue duquel 28 habitants de Kyiv ont péri et 172 ont été blessés, au 31 du boulevard Václav-Havel, mais aussi à d’autres endroits de la ville.
Cette nuit-là, la Russie avait envoyé 440 drones et 32 missiles sur toute l’Ukraine, principalement sur la capitale. Les projectiles visent tout bâtiment, installation ou entrepôt pouvant abriter une quelconque activité militaire, mais frappent bien trop souvent des bâtiments civils pour que ce soit un hasard. Le 17 juin, au soleil levant, un drone Shahed russe file s’écraser directement et exploser en plein milieu d’un immeuble d’habitation, y laissant un trou béant. «C’est une loterie infernale», écrit sur Instagram le chanteur Taras Topolia, leader du célèbre groupe de rock Antytila, qui ce matin-là a vu un missi