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Union européenne

Hongrie : la Commission européenne ouvre une procédure d’infraction contre la loi sur la souveraineté

L’exécutif européen a exprimé ce mercredi 7 février son inquiétude concernant l’adoption par le gouvernement de Viktor Orbán, en décembre, d’un paquet législatif instaurant une autorité de surveillance censée «protéger la souveraineté» du pays.
L'ambassadeur américain en Hongrie David Pressman (au premier rang, 2e à droite) et d'autres représentants diplomatiques des États membres de l'OTAN suivent une séance extraordinaire à la demande de l'opposition hongroise pour débattre de la candidature de la Suède à l'OTAN au Parlement hongrois à Budapest le 5 février 2024. (Attila Kisbenedek /AFP)
publié le 7 février 2024 à 15h59

Nouveau bras de fer entre la Hongrie du Premier ministre Viktor Orbán et l’Union européenne (UE). Ce mercredi 7 février, la Commission européenne a lancé une procédure d’infraction contre Budapest, qui concerne l’adoption à la mi-décembre d’une législation instaurant une autorité de surveillance censée prévenir «les interférences étrangères» dans le processus électoral et «protéger la souveraineté» du pays. Le nouveau «bureau indépendant de protection de la souveraineté», mis en place à l’approche des élections européennes et municipales de juin 2024, aura pour mission «d’enquêter» sur les «attaques illégales» menaçant la sécurité nationale. Mais ce paquet législatif, qui prévoit des peines d’emprisonnement, est dénoncé par les ONG et les détracteurs de l’exécutif, qui y voient une nouvelle offensive visant à museler les contre-pouvoirs.

L’exécutif européen a précisé, dans un communiqué, avoir envoyé à Budapest une lettre de mise en demeure pour violations du droit de l’UE. Le gouvernement hongrois a désormais deux mois pour y répondre. Après «une évaluation approfondie», «la Commission soulève des sérieuses préoccupations quant à la conformité (de la nouvelle loi) avec le droit de l’UE», notamment concernant «le principe de démocratie, les droits électoraux, le respect de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, la protection des données de l’UE et plusieurs règles applicables au marché intérieur», explique une porte-parole. «La création d’une nouvelle autorité dotée de pouvoirs étendus et d’un régime strict de surveillance et de sanctions risque de nuire gravement à la démocratie en Hongrie», a-t-elle ajouté lors d’une conférence de presse.

«Faire taire les voix critiques»

Le gouvernement hongrois accuse régulièrement l’UE et «diverses organisations» étrangères, américaines notamment, de «distribuer des milliards d’euros» à l’opposition afin «d’influencer le choix des électeurs». Les investigations de l’autorité, dirigée par un proche de Viktor Orbán, pourraient conduire à l’ouverture d’enquêtes judiciaires, avec à la clé d’éventuelles peines de prison pour tout candidat à des élections mis en cause. Autre objet d’inquiétude : le pouvoir illimité et sans recours possible de la nouvelle instance pour demander des données sensibles et des informations privées.

Plusieurs ONG de défense des droits humains, dont Amnesty International, ont dénoncé la volonté du gouvernement de «faire taire les voix critiques», estimant que pourraient être ciblés «journalistes, entreprises, syndicats, églises et municipalités». Les États-Unis s’étaient dits «préoccupés» par une «loi incompatible avec nos valeurs communes de démocratie, de liberté individuelle et d’état de droit» qui dote le gouvernement «d’outils draconiens pouvant être utilisés pour intimider et punir les personnes dont les opinions ne sont pas partagées par le parti au pouvoir», le Fidesz. A ce jour, 21 milliards de fonds européens qui sont destinés à la Hongrie demeurent gelés par l’UE dans le cadre de différentes procédures en raison des manquements à l’État de droit reprochés à Budapest.