La Grèce continue de lutter contre «le pire incendie de l’année». Pour le troisième jour consécutif ce mardi 13 août, le pays tente de maîtriser les gigantesques flammes qui ravagent la banlieue nord-est d’Athènes, laissant derrière elles une épaisse fumée noire. Mais alors que des milliers de personnes fuient leur domicile, la solidarité européenne s’organise pour venir en aide aux sauveteurs. Plusieurs pays – dont la France – ont accepté d’envoyer ces dernières heures des équipes de sapeurs-pompiers, des avions ou encore des hélicoptères vers la Grèce, dans le cadre du mécanisme européen de protection civile (MEPC). Un outil créé par la Commission européenne, qui entend «améliorer la prévention, préparation et réaction aux catastrophes».
Un outil de solidarité en cas de catastrophe
Le dispositif a vu le jour il y a plus de vingt ans, en 2001. Son objectif : «Renforcer la coopération en matière de protection civile, détaille la Commission sur son site, qui rappelle que les catastrophes ne connaissent pas de frontières». L’outil regroupe l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne, mais aussi dix autres pays : l’Albanie, la Bosnie-et-Herzégovine, l’Islande, la Moldavie, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Norvège, la Serbie, la Turquie et l’Ukraine.
Reportage
Concrètement, comment ça fonctionne ? Lorsqu’un pays connaît une catastrophe (épidémie, guerre, inondation, feux de forêt…) et que ses capacités de réponse sont dépassées, il peut faire appel au MEPC. C’est alors à lui de déclencher le mécanisme auprès du Centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC) de la Commission européenne. «On ne peut pas activer nous-même le mécanisme. On travaille uniquement si le pays le demande», insiste Daniel Puglisi, attaché de presse de la Commission européenne pour la gestion des crises et de l’aide humanitaire.
Les pays participants peuvent ensuite répondre favorablement ou non à l’appel, en envoyant des équipes de terrain ou du matériel. Une fois l’aide acceptée, l’ERCC coordonne l’acheminement et le déploiement des ressources proposées, en lien avec les autorités nationales. «Et on fait attention à respecter la demande du pays. Si la Grèce réclame deux hélicoptères par exemple, nous n’allons pas lui en envoyer dix», poursuit Daniel Puglisi.
«RescEU», un niveau de protection supplémentaire
Mais face à la multiplication des catastrophes naturelles et des conflits sur le continent européen, les capacités d’entraide des Etats membres sont parfois dépassées. C’est pour cela que l’Union européenne a mis en place le projet «RescEU» en 2019, qui vient compléter le mécanisme. Il s’agit d’une réserve supplémentaire de protection civile au niveau européen, qui s’ajoute à ceux des Etats membres. «Elle comprend une flotte d’avions et d’hélicoptères bombardiers d’eau, un avion d’évacuation médicale, ainsi qu’une réserve d’articles médicaux et des hôpitaux de campagne permettant de faire face aux urgences sanitaires», détaille l’Union européenne. De quoi permettre «une réaction plus rapide et plus globale», assure Bruxelles.
Concrètement, ce matériel de réserve se situe sur le territoire d’un ou plusieurs Etats membres. Cet été, «vingt-huit avions et quatre hélicoptères» stationnés dans dix pays étaient mis à disposition en cas de besoin, prêts à être déployés, détaille Balazs Ujvari, porte-parole de l’Union européenne pour la gestion des crises. Outre RescEU, le service Copernicus de gestion des urgences peut être mis à contribution. En produisant des cartes satellitaires, il permet de délimiter les zones touchées, et ainsi mieux cibler les opérations de secours.
To support Greece's fight against the ongoing wildfires, the #EUCivilProtection Mechanism has mobilised:
— EU Civil Protection & Humanitarian Aid 🇪🇺 (@eu_echo) August 12, 2024
🛩️ 2 firefighting planes from the #rescEU fleet in Italy
🚁 1 helicopter from the rescEU fleet in France
🚒 Ground firefighting teams from Czechia and Romania pic.twitter.com/GXBkPAYFbx
Activé plus de 700 fois
Le mécanisme peut être activé à la demande de n’importe quel Etat, organisation internationale ou agence de l’ONU, et peut être déployé partout dans le monde. Depuis sa création en 2001, l’outil «a répondu à plus de 700 demandes d’assistance, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’UE», chiffre la Commission européenne. Il a notamment été déployé de nombreuses fois pendant la pandémie, mais aussi après la double explosion au port de Beyrouth en août 2020 par exemple. Pour la seule année 2023, le mécanisme a été activé 66 fois, «en réponse à la guerre en Ukraine, à des incendies en Europe et au tremblement de terre en Syrie et en Turquie», poursuit Bruxelles.
Et si les Etats membres mettent leurs ressources à disposition, c’est bien la Commission européenne qui finance le fonctionnement général du MEPC. Plus précisément, l’institution contribue à au moins 75 % des frais de transport et/ou des coûts opérationnels des missions de déploiement. En plus des contributions des pays participants, une enveloppe issue du budget pluriannuel et du plan de relance de l’UE est aussi dédiée au mécanisme. Pour la période 2021-2027, son budget s’élève à 3,3 milliards d’euros.
De nouveaux avions à l’avenir
Mais si Balazs Ujvari salue une réponse «rapide» en Grèce, qui a activé le mécanisme dans la nuit de dimanche à lundi il l’admet : l’outil peut parfois être dépassé. «Il est très efficace lorsqu’une catastrophe touche seulement un ou deux pays. Mais si la même situation touche l’ensemble du continent et qu’aucun membre ne peut offrir son aide, comme on l’a vu pendant le Covid, le mécanisme peut se voir un peu paralysé». Pour le porte-parole, il est donc plus que jamais primordial «d’accumuler des stocks au niveau de l’UE, pour avoir un matériel sur lequel nous pouvons compter».
Allant dans ce sens, Bruxelles a annoncé ce mardi le lancement de la production de douze avions de lutte contre les incendies. Des aéronefs «destinés à constituer la flotte permanente RescEU», qui seront «financés par la Commission européenne et deviendront la nouvelle pierre angulaire de la réponse de crise de l’UE pour lutter contre les incendies de forêt», se félicite la Commission européenne dans un communiqué. Le premier lot de ces avions devrait être livré pour la fin de 2027. L’objectif : que ces nouvelles réserves puissent être rapidement déployées dans le futur, «alors que les saisons des feux de forêt deviennent plus longues, plus meurtrières et plus imprévisibles».