Nul besoin d’attendre les résultats définitifs. Dans les colonnes de la presse britannique, le raz-de-marée travailliste balaye tout ce vendredi 5 juillet. Après quatorze années passées dans l’opposition, le Labour a remporté une majorité sans appel avec 412 sièges sur 650, selon les derniers chiffres. Une «victoire écrasante pour le Parti travailliste», titre le Guardian, qui évoque «l’heure du changement» après «des années de chaos et de division sous les tories».
Tomorrow’s @guardian
— Owen Gibson (@owen_g) July 5, 2024
⏰ 4.30am edition pic.twitter.com/Hfm2otA5HL
Pour la BBC, qui n’hésite pas à parler d’une nuit «qui a transformé le paysage politique», ce résultat marque avant tout «un renversement spectaculaire par rapport aux élections de 2019». Cinq ans plus tôt, le parti travailliste, mené par Jeremy Corbyn, avait subi sa pire défaite électorale depuis près d’un siècle. Promettant désormais une «ère de renouveau national», Keir Starmer – qui vient d’être nommé Premier ministre par le roi Charles III – l’a assuré ce vendredi, dans son discours de victoire : c’est «un parti travailliste changé, prêt à servir notre pays» qui vient de gagner.
Alors sans surprise, c’est le visage du nouveau leader qui décore les kiosques ce matin. «Le gagnant par le sourire», s’amuse le tabloïd The Sun, qui accompagne sa une d’une photo de Keir Starmer aux côtés de sa femme, Victoria. Main dans la main, le couple orne aussi la première page du Daily Mirror, derrière la phrase «Keir we go» («Keir, on y va»). Un peu partout, c’est le même mot qui revient : «landslide», ou «victoire écrasante» en français. Et pour le Times, impossible de ne pas faire le parallèle avec le score historique du Labour en 1997, qui avait remporté 418 sièges. «Starmer est en passe de devenir Premier ministre avec une majorité à la Blair», insiste le quotidien.
«La pire raclée de tous les temps»
Au-delà de la victoire du Labour, c’est aussi l’humiliante défaite du gouvernement sortant qui est pointée du doigt ce vendredi. Selon des résultats encore provisoires, les conservateurs n’obtiendraient que 136 sièges, contre 365 lors des dernières élections en 2019. «La pire raclée de tous les temps», fustige The Independent, qui a choisi de mettre face à face une photo de Keir Starmer allant voter avec sa femme et une autre de Rishi Sunak faisant de même avec la sienne.
A lire aussi
Sévèrement battu, le désormais ex-Premier ministre a quitté Downing Street ce matin, pour céder sa place à son successeur. «Je voudrais dire, avant toute chose, que je suis désolé», a déclaré Rishi Sunak, endossant la responsabilité de cet échec, et annonçant qu’il allait démissionner de la tête du Parti conservateur. Une défaite douloureuse, dont n’a pas hésité à se moquer le Daily Star : «Quatorze ans au pouvoir : ces bons moments en intégralité», titre le tabloïd… avec une feuille vierge en une.
Mais si les tories ont vécu le pire résultat «de l’histoire moderne», comme le rappelle le Daily Telegraph, ces résultats démontrent aussi, pour le Financial Times, la montée en puissance de Reform UK, le parti d’extrême droite mené par Nigel Farage. Pour la première fois et après sept tentatives infructueuses, l’artisan du Brexit a en effet réussi à se faire élire à la Chambre des communes, ainsi que trois de ses collègues. «D’humeur jubilatoire» après que «son parti de droite a grignoté la part de voix des conservateurs», Nigel Farage veut utiliser ces résultats «comme tremplin pour les prochaines élections générales», décrypte le journal.
«Chaleureuses félicitations»
Mais il n’y a pas qu’au Royaume-Uni que les élections ont été suivies. Dans la presse étrangère, le triomphe du Labour est loin d’être passé inaperçu. «Starmer a mis les choses au clair», souligne le quotidien allemand Bild, tandis que l’espagnol El Mundo assure, que «en moins de quatre ans, [le nouveau Premier ministre] a réussi à redresser le navire travailliste». «Ce n’est pas une défaite conservatrice, c’est une dévastation», titre El Pais.
Du côté des dirigeants, les félicitations affluent ce vendredi. Au niveau européen, le président du Conseil européen, Charles Michel, a salué la «victoire électorale historique» de Keir Starmer, avant de rappeler qu’ils se rencontreront lors du sommet de la Communauté politique européenne prévu le 18 juillet. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a quant à elle affirmé avoir «hâte de travailler» avec le leader travailliste, pour «renforcer la sécurité européenne». Lors de sa campagne, Keir Starmer a promis de réduire les tensions commerciales avec l’Union européenne, premier partenaire du Royaume-Uni. Mais il a aussi assuré que son gouvernement ne remettrait jamais en cause le Brexit, et qu’il n’essaierait pas de revenir dans le marché unique européen.
A deux jours du second tour des législatives en France, Emmanuel Macron a lui aussi pris le temps de féliciter le nouveau Premier ministre britannique. Ce vendredi, le président français s’est dit «heureux de (son) premier échange» avec Keir Starmer, assurant qu’ils allaient «poursuivre le travail engagé avec le Royaume-Uni pour notre coopération bilatérale, pour la paix et la sécurité de l’Europe, pour le climat et l’IA».
Et il n’y a pas que les Etats membres européens qui se sont exprimés ce vendredi. Alors qu’Israël doit retourner à la table des négociations pour un cessez-le-feu au Qatar, le chef de l’Etat, Isaac Herzog, a adressé ses «chaleureuses félicitations» à Keir Starmer, disant se «réjouir de travailler avec lui et son nouveau gouvernement pour ramener nos otages à la maison» et «construire un meilleur avenir pour la région». Le président de l’Etat hébreu a aussi tenu à exprimer sa «gratitude» envers Rishi Sunak, pour «avoir soutenu le peuple israélien […] au cours de cette période très difficile».