«La Hongrie quitte la CPI.» Dans un post Facebook publié ce jeudi 3 avril, Gergely Gulyas, directeur de cabinet du Premier ministre nationaliste Viktor Orbán, a fait part d’une décision lourde de sens prise par la Hongrie, au moment même où le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, sous le coup d’un mandat d’arrêt de la même CPI, se trouve sur le sol hongrois. Israël s’est immédiatement réjoui de ce choix, la évoquant une «position morale forte» de la Hongrie. Quelques instants plus tard, la CPI a rappelé que Budapest restait «tenu de coopérer» avec la cour, tandis que l’Autorité palestinienne appelle la Hongrie à procéder à l’arrestation de Nétanyahou.
La Hongrie a dénoncé à plusieurs reprises une institution jugée «politiquement biaisée» et a décidé de franchir le pas dans le sillage de Donald Trump, qui a imposé en février des sanctions à la Cour pour ce qu’il a qualifié d’«actions illégitimes et sans fondement visant l’Amérique et notre proche allié Israël». Contactée, la Cour basée à La Haye (Pays-Bas) s’est refusée à tout commentaire. Le retrait d’un Etat ne prend effet qu’un an après le dépôt officiel du dossier auprès du secrétariat général de l’Onu.
«Décision honteuse»
Cette annonce intervient alors que Viktor Orbán reçoit son homologue israélien, malgré le mandat d’arrêt émis en novembre 2024 par la CPI contre ce dernier. Arrivé dans la nuit, Benyamin Nétanyahou a été reçu jeudi matin avec les honneurs militaires.
Analyse
La Hongrie l’avait invité dès la nouvelle de la CPI connue, se disant «choquée par une décision honteuse». En retour, Israël a salué la «clarté morale» du pays. La juridiction a rappelé «l’obligation légale» de Budapest et sa «responsabilité envers les autres Etats parties» pour exécuter les décisions. «En cas d’inquiétudes sur leur coopération avec la Cour, les Etats peuvent la consulter, souligne son porte-parole Fadi El Abdallah. Mais il ne leur appartient pas de déterminer unilatéralement le bien-fondé des décisions juridiques de la CPI.»
Fondée en 2002, la Cour pénale internationale a pour mission de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves commis dans le monde, lorsque les pays n’ont pas la volonté ou la capacité de le faire eux-mêmes. Elle compte aujourd’hui 125 Etats membres ayant ratifié le statut de Rome, son traité fondateur.
La Hongrie a bien signé en 1999 le Statut de Rome, traité fondateur de la CPI, ratifié deux ans plus tard, au cours du premier mandat de Viktor Orbán. Mais elle n’a pas validé la convention associée pour des raisons de constitutionnalité et affirme donc ne pas être obligée de se conformer aux décisions de la Cour internationale. A ce jour, seuls deux Etats ont claqué la porte : le Burundi et les Philippines.
Donald Trump la dénigre ouvertement depuis sa prise de mandat, lui imposant même des sanctions en février, tandis que Vladimir Poutine est pour sa part visé depuis mars 2023 par un mandat pour le crime de guerre présumé de déportation d’enfants ukrainiens vers la Russie. Sur les 60 mandats d’arrêt délivrés depuis 2002, seuls 21 avaient été exécutés, avant la récente arrestation de l’ancien président des Philippines, Rodrigo Duterte.
Mis à jour : à 12h19 avec les réactions d’Israël et de la CPI et à 14h29 avec celle de l’Autorité palestinienne.