La journaliste Marina Ovsiannikova, connue en Occident pour avoir sorti en mars une pancarte anti-guerre en plein JT sur la première chaîne télévisée russe, comparaissait ce jeudi midi au tribunal pour de nouveaux faits «discréditant les forces armées russes». Reconnue coupable, elle a été condamnée à verser une amende de 50 000 roubles, soit à peine plus de 800 euros. Elle risquait 15 ans d’emprisonnement, risque d’autant plus grand après une récidive.
C’est la deuxième fois que la journaliste est jugée pour des actions anti-guerre. Cette fois-ci, c’est sa prise de parole lors du procès d’Ilia Iachine, un opposant politique à Vladimir Poutine, qui était dans le viseur de la justice. Devant le tribunal, elle avait dénoncé la guerre en Ukraine, la qualifiant de «crime» auprès des journalistes. Interpellée, elle avait été relâchée dans la journée. Quelques jours plus tôt, elle avait publié une vidéo avec une nouvelle pancarte, devant le Kremlin. Sur celle-ci étaient inscrits les mots : «Poutine est un tueur. Ses soldats sont des fascistes. 352 enfants sont morts. Combien d’enfants doivent encore mourir pour y mettre fin ?» Pour ces faits, des poursuites n’ont pour le moment pas été engagées.
Ancienne propagandiste du Kremlin
Jeudi à la sortie de l’audience, Marina Ovsiannikova a expliqué que «toutes ces accusations étaient absurdes» et que ce procès avait «été organisé pour [lui] faire peur, pour agir contre ceux qui sont contre cette guerre». Puis elle a appuyé son propos en dénonçant les chiffres officiels : «Les sondages qu’on nous montre disent que 80 % de la population soutient Poutine et soutient l’opération spéciale. C’est évidemment faux. Qui ose dire à Moscou qu’il soutient l’opération spéciale ?»
L’ancienne propagandiste du Kremlin, qui a officié une vingtaine d’années pour Pervy Kanal, la première chaîne d’information, ne fait pas l’unanimité. Certains, en Ukraine notamment, s’étonnent de la légèreté des condamnations – la première amende, pour son intervention télévisée, lui a coûté 250 euros. Ils remettent même en question son divorce avec le Kremlin, laissant entendre que ses actions pourraient être téléguidées par Moscou, histoire de prétendre que la liberté d’expression existe encore en Russie. D’autres lui reprochent ses années télévisées, où elle était rédactrice en chef et n’avait jamais critiqué le pouvoir russe.
Marina Ovsiannikova, qui avait quitté la Russie quelques mois par peur des représailles, est finalement rentrée au pays, officiellement pour régler des problèmes liés à la garde de ses enfants, restés avec son ex-mari. Elle a affirmé vouloir continuer à dénoncer la «dictature» et les répressions politiques en Russie.