Si l’Ukraine et la Moldavie sourient après s’être vus reconnaître le statut de candidat à l’adhésion à l’Union européenne, jeudi soir à Bruxelles, d’autres pays font grise mine. «Nous n’avons rien obtenu», a résumé sèchement le président serbe Aleksandar Vucic, au cours d’une conférence de presse commune dans la capitale belge, avec ses homologues albanais et macédonien. Les trois pays des Balkans occidentaux attendent depuis des années une adhésion à l’Union européenne et la journée de jeudi n’a pas permis d’accélérer le processus.
Le veto mis par la Bulgarie à l’ouverture des négociations d’adhésion avec la Macédoine du Nord pour des raisons de contentieux historiques et culturels a ulcéré les dirigeants des Balkans. «La position bulgare reste inchangée jusqu’à ce que le parlement bulgare prenne une décision», a annoncé Kiril Petkov, le Premier ministre bulgare, renversé ce mercredi soir par une motion de censure.
Déblocage possible dès ce vendredi à Sofia
Le Parlement qui l’a fait chuter pourrait décider dès ce vendredi de lever le veto. Les députés doivent se prononcer sur un compromis proposé par la France. Il prévoit un changement de la Constitution nord-macédonienne pour inclure les Bulgares dans les groupes ethniques reconnus. «Je crois que nous sommes très proches d’un accord», a déclaré le président français Emmanuel Macron, appelant les Bulgares «à faire leur devoir d’Européens».
Le Premier ministre de Macédoine du Nord, Dimitar Kovacevski, avait toutefois jugé que cette proposition de compromis «dans sa forme actuelle» était «inacceptable», lors de sa conférence de presse. En raison du différend Sofia-Skopje, les négociations avec l’Albanie sont également bloquées, les deux candidatures étant liées par l’UE. Le Premier ministre albanais, Edi Rama, a dénoncé le blocage et le fait que les 26 autres membres de l’UE «restent assis et offrent un spectacle effrayant d’impuissance». «C’est un coup dur pour la crédibilité de l’Union européenne», a aussi lancé Dimitar Kovacevski.
Analyse
La conférence de presse prévue à l’issue du sommet avec les présidents des institutions européennes et le président français Emmanuel Macron a été annulée, officiellement pour une question de temps. «Ils ont été très intelligents de l’annuler. Cela démontre qu’ils se sentent vraiment très mal face à ce qui se passe», a commenté Edi Rama, qui a multiplié les piques à l’adresse de ses homologues de l’UE. «La Macédoine du Nord est candidate depuis dix-sept ans, si je n’ai pas perdu le compte, et l’Albanie depuis huit ans», a-t-il rappelé. La Serbie attend depuis 2012 et le Monténégro négocie depuis 2010.
Les dirigeants des Balkans occidentaux n’ont pas caché non plus leur amertume devant l’empressement de leurs homologues auprès de l’Ukraine et de la Moldavie. Mais avant de prendre cette décision, ils ont eu un long débat sur les demandes des Balkans. Ils se sont dits «prêts» à accorder le statut de pays candidat à la Bosnie-Herzégovine. Ils prendront leur décision sur la base des conclusions d’un rapport demandé à la Commission européenne pour le mois d’octobre sur la mise en œuvre d’une série de réformes par ce pays, menacé par les tentations séparatistes. La Bosnie-Herzégovine et le Kosovo, qui n’est pas reconnu par cinq membres de l’UE, ne sont encore que des «candidats potentiels».