L’addition est salée. Quitter l’Union européenne aurait coûté 33 milliards de livres au Royaume-Uni, soit plus de 37 milliards d’euros. C’est la conclusion du Centre for European Reform (CER), centre de réflexion dédié à l’UE localisé à Londres, Bruxelles et Berlin, dans son estimation publiée ce mercredi. D’après le CER, le PIB du Royaume-Uni est 5,5% moins élevé au deuxième trimestre de 2022 que si le pays était resté au sein de l’UE. L’écart entre l’économie d’un Royaume-Uni dans l’UE et hors de l’UE se fait sentir dès le début de la sortie du pays de l’Union, c’est-à-dire dès la mise en œuvre du Brexit. Depuis, il s’est lentement creusé et se stabilise aujourd’hui à environ 5% en dessous du PIB que le pays aurait dû avoir.
Pour établir ces estimations, le CER s’appuie depuis 2018 sur les économies de 22 pays ayant une croissance similaire à celle que connaissait le Royaume-Uni avant de quitter l’UE et réunit ces 22 courbes en une seule grâce à un algorithme. Le CER compare ensuite, en trois courbes distinctes, l’évolution du PIB, de l’investissement et du commerce de biens et services britannique à la courbe des 22 pays, qui représentent l’économie que le Royaume-Uni aurait dû avoir sans divorce avec Bruxelles. Les 22 pays sont de grandes puissances occidentales, dont une majorité de pays européens (France, Allemagne, Belgique, Italie, Espagne, etc.) ainsi que l’Australie, le Canada, le Japon et la Nouvelle-Zélande.
Hausse d’impôts
La courbe documentant l’investissement suit la même logique : un décrochage au moment du Brexit et un écart de 11% aujourd’hui, soit une perte de 12 milliards de livres pour Londres. Le pays a aussi tiré un trait sur 15 milliards de livres en commerce de biens depuis sa sortie de l’Union. Le CER explique notamment ce décalage par le nombre de touristes moins important au Royaume-Uni que dans les 22 pays analysés pour la courbe comparative.
A lire aussi
Le centre souligne par ailleurs que le Brexit a entraîné des hausses d’impôt. En mars 2022, Rishi Sunak, alors chancelier de l’Echiquier (équivalent du ministre des Finances), a dévoilé un plan comprenant des augmentations de taxes censées rapporter à Londres 46 milliards de livres en deux ans. Or, si le Royaume-Uni n’était pas sorti de l’UE, son PIB serait supérieur à l’actuel, et ces hausses d’impôts, avec un taux identique, auraient permis d’engranger près de 40 milliards de livres (46 milliards d’euros) de plus.
Inflation galopante
Deux ans après la sortie effective de l’UE, les conséquences du Brexit se font encore lourdement ressentir outre-Manche. Encore mi-novembre, une autre étude plaçait Londres en deuxième place boursière derrière Paris pour la première fois, avec un écart de 2 milliards de dollars en capitalisation boursière. Alors que les conservateurs assuraient en 2016 que «la nourriture sera moins chère. L’énergie et les carburants seront moins chers. Les impôts seront moins élevés», la réalité est inverse. La crise du Covid-19 a certes provoqué un coup d’arrêt. Comme ses voisins, le Royaume-Uni s’est retrouvé avec un PIB en chute libre en 2020 et enduré des conséquences du ralentissement de son économie pendant de nombreux mois. A peine relevé, le pays a été touché par la crise énergétique causée par la guerre en Ukraine qui a éclaté en février 2022. Résultat : l’inflation a atteint les 11,1% sur un an en octobre, le plus haut taux depuis 1981 dans le pays. En 2022, les prix du gaz ont bondi de près de 130 % quand l’électricité s’est envolée de 66 %. Le tout provoquant une crise politique forçant la Première ministre Liz Truss, qui portait un programme basé sur des baisses d’impôt irréalistes, à démissionner en octobre. Pour faire face, le gouvernement Rishi Sunak a présenté en novembre un budget d’austérité, à base de hausses d’impôts et de coupes dans la dépense publique. Quelle est la part du Brexit dans la situation économique actuelle du Royaume-Uni ? Difficile à quantifier, si le pays n’est pas le seul en Europe à souffrir des suites du Covid-19 et de la guerre en Ukraine, il l’est face aux conséquences de sa sortie de l’UE, ces crises se nourrissant l’une et l’autre.