Alors que Simon Harris, 37 ans, s’apprête à devenir ce mardi le plus jeune taoiseach (Premier ministre) de l’histoire de la République d’Irlande, le manque d’excitation est palpable. A Dublin, les regards ne sont pas tournés vers lui, ni vers son parti, mais plutôt vers l’opposition. En effet, depuis les dernières élections en 2020, le Sinn Féin apparaît comme la principale menace pour les deux formations qui dominent traditionnellement la vie politique en République d’Irlande, le Fine Gael et le Fianna Fáil, qui gouvernent avec les Verts dans une coalition de centre droit.
Il y a quelques décennies, le Sinn Féin («nous-mêmes», en irlandais) était pourtant le paria de la vie politique irlandaise. Fondé en 1905, le parti a soutenu la lutte violente de l’armée républicaine irlandaise (IRA) pendant la guerre civile qui a divisé l’Irlande du Nord de 1969 à 1998, et y est resté étroitement associé dans l’imaginaire collectif. En 1994, les voix de ses représentants étaient encore doublées à la télévision britannique – une idée de Margaret Thatcher visant à «priver les terroristes de l’oxygène de la publicité».