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Scrutin

Législatives en Géorgie : le parti au pouvoir remporte les élections, l’opposition pro-européenne refuse le résultat

Le parti Rêve géorgien est en passe ce samedi 26 octobre au soir de remporter les élections contre les quatre partis d’opposition s’étant coalisés. Des incidents ont par ailleurs eu lieu dans plusieurs bureaux de vote.
Bidzina Ivanishvili, le fondateur de Rêve géorgien, à Tbilissi ce samedi 26 octobre au soir. (Giorgi Arjevanidze/AFP)
publié le 26 octobre 2024 à 17h31
(mis à jour le 27 octobre 2024 à 9h44)

C’est l’épilogue d’élections législatives aussi cruciales qu’indécises pour l’avenir de la Géorgie, divisée entre une opposition pro-européenne et un parti au pouvoir accusé de dérive autoritaire prorusse. Le Rêve Géorgien a remporté 54,08 % des voix, contre 37,58 % à la coalition pro-européenne, selon le dépouillement réalisé dans plus de 99 % des circonscriptions, a précisé ce dimanche 27 octobre lors d’une conférence de presse le président de la commission électorale centrale Giorgi Kalandarishvili.

Dans la nuit, l’opposition a toutefois refusé de concéder sa défaite. «Nous ne reconnaissons pas les résultats faussés d’élections volées», a déclaré lors d’une conférence de presse, Tina Bokoutchava, cheffe du Mouvement national uni (MNU), un des quatre partis de la coalition d’opposition.

Samedi soir, à l’issue de la fermeture des bureaux de vote, les deux camps avaient revendiqué la victoire. L’opposition pro-européenne était donnée en tête devant le parti au pouvoir dans un sondage réalisé pour une chaîne de télévision favorable à opposition par l’institut américain Edison Research. Les quatre partis pro-européens auraient remporté un total de 51,9 % des suffrages, contre 40,9 % pour Rêve Géorgien, d’après ce sondage.

Dans la foulée, Tina Bokuchava, cheffe du Mouvement national uni, l’une des quatre formations, a revendiqué la victoire : «Rêve géorgien a perdu, le peuple géorgien et l’Europe ont gagné». De son côté, la présidente Salomé Zourabichvili a déclaré dans un message publié sur X (ex-Twitter) que «la Géorgie européenne gagne avec 52 % des voix, malgré les tentatives de truquer les élections […] Je suis fière et confiante en notre avenir européen !».

Mais peu après, un autre sondage effectué par un institut proche du gouvernement a donné en tête le pouvoir en place, avec 56 % des voix obtenus. Bidzina Ivanichvili, le fondateur milliardaire reclus du parti au pouvoir et ancien Premier ministre, a à son tour revendiqué la victoire. «C’est un cas rare dans le monde que le même parti remporte un tel succès dans une situation aussi difficile - c’est un bon indicateur du talent du peuple géorgien», a déclaré Bidzina Ivanichvili quelques minutes après la fermeture des bureaux de vote.

En milieu d’après-midi, cinq heures avant la fermeture des bureaux de vote, la participation était de 41,62 %, en hausse par rapport à 2016 (34,79 %) et 2020 (36,45 %). Le résultat de ces élections à la proportionnelle pour le renouvellement des 150 sièges du Parlement était difficilement prévisible. D’autant que le scrutin, surveillé par des observateurs internationaux, est déjà marqué par plusieurs incidents, largement relayés en ligne. La commission électorale a annoncé dans l’après-midi avoir été saisie de 133 réclamations sur des violations du secret du vote, des incidents à l’extérieur de bureaux de vote, des obstacles au travail des observateurs…

«Incidents violents profondément préoccupants»

Des images semblant montrer un bourrage d’urnes à Sadakhlo, un village de l’est, ont été très partagées par l’opposition. La commission électorale a annulé les bulletins dans ce bureau. L’opposante Tina Bokoutchava a accusé les «voyous» du Rêve géorgien de «s’accrocher au pouvoir» et de «miner le processus électoral», des propos rejetés par ce parti.

Une vidéo sur une bagarre dans un bureau de vote à Tbilissi a poussé la présidente Salomé Zourabichvili à demander au ministre de l’Intérieur d’agir. Dans un message vidéo, elle s’est inquiétée des «incidents violents profondément préoccupants […] dans différents bureaux de vote». L’association des jeunes avocats, qui surveille ces législatives, a fait état de «violations électorales significatives».

De récentes enquêtes d’opinion montrent qu’une alliance inédite de formations d’opposition pourrait vaincre le Rêve géorgien, le parti conservateur du milliardaire Bidzina Ivanichvili. Au pouvoir depuis 2012, il est accusé d’éloigner la Géorgie de l’Union européenne et de l’Otan, à laquelle elle ambitionne également d’adhérer. Parmi le quatuor de partis d’opposition concernés se trouve le Mouvement national uni de l’ex-président emprisonné Mikheïl Saakachvili, l’ennemi juré de Bidzina Ivanichvili.

La Géorgie a été secouée en mai par de grandes manifestations contre une loi sur «l’influence étrangère», inspirée d’une législation russe sur les «agents de l’étranger» utilisée pour écraser la société civile. Bruxelles a gelé dans la foulée le processus d’adhésion de la Géorgie à l’UE et les Etats-Unis ont pris des sanctions contre des responsables géorgiens.

Autre cause de tensions avec les Occidentaux : la récente promulgation d’une loi restreignant fortement les droits des personnes LGBT + en Géorgie, un pays de tradition chrétienne orthodoxe où l’hostilité envers les minorités sexuelles demeure forte.

Mise à jour : ce dimanche 27 octobre à 9h44, avec l’ajout de la déclaration du président de la commission électorale centrale et de la cheffe du Mouvement national uni.