«Ils ont littéralement voulu me transformer en schnitzel [escalope viennoise, ndlr].» Leonid Volkov ne manque pas d’humour pour décrire, sur Telegram, l’agression qu’il a subie mardi 12 mars au soir. Cet opposant russe en exil, ex-bras droit d’Alexeï Navalny, a été violemment attaqué devant son domicile à Vilnius. Alexeï Volkov a précisé avoir été agressé par un homme qui l’a frappé «environ 15 fois» avec un objet contondant, et souffrir notamment d’une fracture au bras. L’agression a probablement été «organisée par la Russie», a affirmé Vilnius en fin de matinée. «Je tiens à préciser que les services vont évaluer, enquêter et, je l’espère, trouver les coupables», a déclaré devant la presse lituanienne à Paris le président lituanien, Gitanas Nauseda. Et d’avertir : «Quant à Poutine, je ne peux dire qu’une chose : personne n’a peur de vous ici.»
Le ministre lituanien des Affaires étrangères Gabrielius Landsbergis a par ailleurs condamné une attaque «choquante» et assuré, dans un message sur le réseau social X, que ses auteurs devront «répondre de leurs crimes». Un porte-parole de la police lituanienne, Ramunas Matonis, a confirmé qu’un citoyen russe avait été agressé près de sa maison dans la capitale Vilnius à environ 22 heures heure locale (21 heures heure française). Aucun suspect n’a été identifié à ce stade et plus de détails sur cette agression doivent être communiqués mercredi matin, a précisé le porte-parole.
Agé de 43 ans, Leonid Volkov est l’une des principales figures de l’opposition russe et était l’un des lieutenants d’Alexeï Navalny, mort le 16 février à l’âge de 47 ans dans une colonie pénitentiaire de l’Arctique où il purgeait une peine de 19 ans de prison pour «extrémisme». Dans la nuit, l’ex-porte-parole d’Alexeï Navalny, Kira Iarmich, avait indiqué que l’opposant avait fait l’objet d’un véritable guet-apens. Il a été «attaqué à l’extérieur de sa maison. Quelqu’un a brisé la vitre d’une voiture et l’a aspergé de gaz lacrymogène dans les yeux avant de commencer à frapper Leonid avec un marteau».
«Le bras de Leonid est cassé et il ne peut pas encore marcher»
Conduit aux urgences, Alexeï Volkov a finalement pu regagner son domicile. «Nous sommes à la maison. Le bras de Leonid est cassé et il ne peut pas encore marcher», a écrit son épouse Anna Birioukova sur X. Elle a diffusé des photos montrant les blessures subies par l’opposant, notamment un œil au beurre noir, une marque rouge sur son front et du sang sur une de ses jambes.
Alexeï Volkov juge ce mercredi que l’agression dont il a été victime était «typique» du mode opératoire des hommes de main du président russe Vladimir Poutine, mais qu’elle ne le dissuaderait pas de continuer à militer pour la démocratie. «Nous allons travailler et nous n’abandonnerons pas», a-t-il souligné sur Telegram.
Cette agression survient près d’un mois après la mort d’Alexeï Navalny dans une prison russe en Arctique et à quelques jours de l’élection présidentielle en Russie, organisée de vendredi à dimanche, qui devrait consacrer un nouveau triomphe Vladimir Poutine, faute de véritables opposants. «Poutine a tué Navalny. Et beaucoup d’autres personnes avant ça», avait écrit lundi sur les réseaux sociaux Leonid Volkov, qui était l’ancien chef de cabinet de l’opposant. Il présidait également jusqu’en 2023 la fondation anti-corruption fondée par Navalny.
Les dissidents russes qui se sont exprimés contre le Kremlin se plaignent souvent d’être la cible de menaces et d’attaques. Quelques heures avant son agression mardi, Leonid Volkov avait confié au média russophone indépendant Meduza être inquiet pour sa sécurité depuis la mort d’Alexeï Navalny. «Le principal risque désormais c’est que nous soyons tous tués. Pourquoi, c’est une chose assez évidente», a-t-il déclaré d’après Meduza.
Après la mort de l’opposant numéro un à Vladimir Poutine, à propos de laquelle une quarantaine de pays dont les Etats-Unis et ceux de l’Union européenne ont demandé une enquête internationale, Leonid Volkov a promis que l’équipe de l’opposant russe «n’abandonnerait pas» car «le bien l’emporte toujours sur le mal». Il avait appelé les partisans d’Alexeï Navalny à «ne pas se décourager». «C’est ce qu’il attend de nous maintenant. Ce à quoi il a consacré sa vie doit gagner.»
Mise à jour : ajout à 11 h 35 de la déclaration de Vilnius sur une attaque possiblement organisée de Russie ; ajout à 12 h 30 de la déclaration du président lituanien.