Des files de voitures et de camions massés à la frontière entre la Serbie et le Kosovo. Les images diffusées ce jeudi matin à la télévision publique serbe pourraient sembler banales en temps normal. Mais après l’un des plus importants pics de tensions dans les Balkans depuis des années, elles semblent marquer un retour au calme dans le Nord du Kosovo. Après trois semaines de tensions entre la Serbie et le Kosovo, la police de la région a confirmé ce jeudi la réouverture officielle du principal poste-frontière avec la Serbie.
La veille au soir, le président serbe, Aleksandar Vucic, avait annoncé le démantèlement des barrages, avertissant néanmoins que «la méfiance demeure», lors d’une rencontre avec des représentants des Serbes du Kosovo. Plus tôt dans la journée, dans un geste manifestement destiné à apaiser les tensions, un tribunal de Pristina, la plus grande ville du Kosovo, avait ordonné la libération et le placement en résidence surveillée de Dejan Pantic, un ex-policier serbe dont l’arrestation avait déclenché la colère de la minorité serbe depuis trois semaines.
Carcasses incendiées
L’homme avait été interpellé le 10 décembre pour avoir agressé un officier de police en service. En réaction, les Serbes du nord du Kosovo avaient échangé des coups de feu avec la police et érigé plus de 10 barrages routiers, exigeant qu’il soit libéré.
La décision du tribunal de libérer Dejan Pantic a provoqué la colère de membres du gouvernement du Kosovo. «Je ne sais pas comment la comprendre et comment il est possible qu’une personne accusée d’un crime aussi grave lié au terrorisme soit assignée à résidence», s’est insurgée la ministre de la Justice, Albulena Haxhiu.
Autres preuves que toutes les tensions ne semblaient pas apaisées, les carcasses incendiées jeudi au petit matin de camions qui formaient une barricade à Dudinog Krša, dans la région frontalière de Mitrovica.
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— ANADOLU AGENCY (BHSC) (@aa_balkans) December 29, 2022
La situation semble toutefois en voie de normalisation après des semaines d’escalade. Début novembre, des centaines de policiers serbes intégrés à la police kosovare, ainsi que des juges, procureurs et autres fonctionnaires avaient quitté leurs postes en masse pour protester contre une décision de Pristina, désormais suspendue, d’interdire aux Serbes vivant au Kosovo d’utiliser des plaques d’immatriculation délivrées par la Serbie. La semaine dernière, c’est la Première ministre serbe, Ana Brnabic, qui avait jugé que la situation dans la région était «au bord du conflit armé». La police kosovare et les forces internationales de maintien de la paix ont subi plusieurs attaques impliquant des armes à feu, alors que la Serbie mettait ses forces armées en état d’alerte.
«Solution politique»
Mercredi, les Etats-Unis et l’Union européenne avaient appelé conjointement à une «désescalade sans condition», assurant travailler avec Belgrade «pour trouver une solution politique afin d’apaiser les tensions et parvenir à une avancée dans l’intérêt de la stabilité, de la sécurité et du bien-être de toutes les populations locales». Quant à la Russie, le pays a réaffirmé son soutien à Belgrade. «Nous avons des relations très étroites d’alliés, historiques et spirituelles avec la Serbie», a déclaré mercredi à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. «Et, bien sûr, nous soutenons Belgrade dans les actions qu’il entreprend.»
Le Kosovo, ex-province serbe, a déclaré son indépendance en 2008, une décennie après une guerre meurtrière entre forces serbes et rebelles albanais. Mais la Serbie ne la reconnaît pas. D’ailleurs, Belgrade encourage même la minorité serbe, environ 120 000 personnes sur 1,8 million d’habitants du Kosovo à refuser toute loyauté à Pristina au moment où les autorités kosovares veulent asseoir leur souveraineté sur l’ensemble du territoire.