Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a confirmé en début de semaine que l’Iran avait livré des missiles balistiques à la Russie. Une annonce faite quelques jours avant sa visite à Kyiv en compagnie de son homologue britannique, David Lammy. Ils ont profité de cette rencontre pour annoncer plusieurs aides supplémentaires à l’Ukraine. La livraison de drones iraniens Shahed à la Russie est avérée depuis déjà deux ans, et celle de missiles plus classiques semblait également acquise. En conséquence, les Occidentaux mettaient en garde Téhéran depuis mars dernier contre son soutien à Moscou en menaçant d’imposer en représailles des «sanctions importantes».
Furieuses, les autorités iraniennes, qui ont «catégoriquement rejeté» ces accusations, ont convoqué ce jeudi 12 septembre les diplomates européens «au ministère des Affaires étrangères à la suite des sanctions et aux propos non constructifs des parties européennes», a annoncé jeudi l’agence de presse officielle Irna.
«Les livraisons d’armes de Corée du Nord et d’Iran sont vitales» pour la Russie, a confirmé à l’AFP un analyste militaire russe sous couvert d’anonymat. Mick Ryan, ancien général australien et chercheur associé au Center for Strategic and International Studies (CSIS), précise que ces missiles balistiques sont «l’un des types de missiles les plus difficiles à intercepter». Ces engins balistiques sont portés par des lanceurs, propulsés en haute altitude avant de retomber en arc de cercle sur leurs cibles. Moscou, dont les réserves s’épuisent, en a employé deux début septembre pour frapper le centre de la ville ukrainienne de Poltava, faisant 58 morts et plus de 300 blessés. Ils offrent donc selon Mick Ryan un atout «significatif» pour «dégrader les infrastructures civiles» ukrainiennes et «terroriser» sa population, afin de «pousser davantage Kyiv à négocier» une paix favorable à Moscou.
Une livraison pas démentie par le Kremlin
Alors que le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, ne cesse de réclamer des armes plus puissantes et moins de restrictions dans leur usage, les Américains refusent toujours leur utilisation hors des frontières ukrainiennes. En réponse aux livraisons iraniennes, les Européens ont donc annoncé de nouvelles sanctions. Notamment contre la compagnie aérienne iranienne Iran Air, accusée d’avoir effectué les livraisons, qui ne pourra plus opérer sur les territoires du Royaume-Uni, des Etats-Unis, de l’Allemagne et de la France. Washington a ajouté que des sanctions avaient été prises avec des pays alliés à l’encontre de six entreprises iraniennes – ainsi que de 10 de leurs responsables et employés – fournisseuses de drones et missiles balistiques à la Russie.
Le Kremlin, via son porte-parole, Dmitri Peskov, n’a pas démenti l’information, relevant que la Russie développait comme elle l’entendait ses relations avec Téhéran. Ces derniers événements pourraient constituer un point de bascule dans le conflit ukrainien et inciter les Occidentaux à répondre favorablement aux demandes pressantes de Kyiv d’utiliser leurs armes sur le territoire russe. Joe Biden a déclaré que les Etats-Unis étaient «en train d’y réfléchir en ce moment même», et la question sera examinée vendredi lors d’une réunion à la Maison Blanche avec le Premier ministre britannique, Keir Starmer.