Sur la vidéo d’à peine une minute, postée samedi 2 décembre sur Telegram, on voit d’abord un groupe de soldats, accroupis et armes à l’épaule, près de ce qui semble être l’entrée d’un abri. On aperçoit un soldat qui en sort, les mains derrière la tête en signe visible de reddition, puis s’allonge face contre terre. A peine quelques secondes plus tard, un second homme en uniforme s’extirpe de la même cachette en trébuchant. Il semble vouloir, lui aussi, se coucher au sol. Mais la vidéo montre presque immédiatement des nuages successifs de fumée blanche, signalant des tirs. Le soldat s’écroule. L’autre tente alors de se relever, mais il s’affale aussitôt.
Le bureau du procureur de Donetsk a annoncé ce dimanche 3 décembre l’ouverture d’une enquête à la suite de la diffusion de la vidéo, en cours d’authentification, et rappelé que l’«exécution de prisonniers de guerre» constituait «un grave crime international». Disant s’appuyer sur des «informations préliminaires», le bureau du procureur affirme que les images montrent «un groupe de personnes portant l’uniforme russe» en train de tirer sur deux militaires ukrainiens «non armés». Elles auraient été filmées près du village de Stepové, à proximité d’Avdiïvka, une ville industrielle proche de Donetsk (est de l’Ukraine) dont les Russes cherchent à s’emparer depuis près de deux mois.
Pour le commissaire ukrainien chargé des droits de l’Homme, Dmytro Lubinets, la scène filmée, qui montre «l’exécution par des militaires russes de soldats ukrainiens qui s’étaient rendus en tant que prisonniers», est un «crime de guerre». Les soldats ukrainiens «étaient désarmés et leurs mains étaient levées» : ils «ne représentaient aucune menace, a affirmé l’officiel sur son compte Telegram. Le camp russe aurait dû les capturer et leur donner le statut de prisonniers de guerre». Le centre des communications stratégiques de l’armée ukrainienne a, lui, évoqué samedi une «vidéo d’exécution». «La Russie a encore une fois violé les lois et les coutumes de la guerre, ainsi que les normes du droit international», s’est-il insurgé.
Ville en grande partie détruite
Interrogé ce dimanche sur la chaîne de télévision ukrainienne Freedom, le maire d’Avdiïvka, Vitaly Barabach, a affirmé que les soldats ukrainiens s’étaient rendus «parce qu’ils n’avaient plus de munitions». Et que les soldats russes que l’on voit sur la vidéo auraient été tués peu après : «Pour autant que je sache, un peu plus tard, nos hommes ont pris d’assaut ces positions, et tous ceux qui s’y trouvaient ont été tués», a-t-il avancé.
"They surrendered because they ran out of ammo. But as far as I know, our troops stormed this position a little later and everyone there, was liquidated," Vitaliy Barabash, head of the Avdiivka city military administration said about the recent shooting of 2 Ukranian POW's. https://t.co/IahYUk7AIE pic.twitter.com/TbO6y7wIxz
— NOELREPORTS 🇪🇺 🇺🇦 (@NOELreports) December 3, 2023
Au cours de la même interview, l’édile a affirmé qu’Avdiïvka, sous le feu continu de l’armée de Moscou depuis un nouvel assaut début octobre, a connu moins d’attaques terrestres au cours des dernières vingt-quatre heures en raison de «fortes pertes» humaines russes et d’une météo difficile. En grande partie détruite, la ville, jugée stratégique par l’armée russe pour son immense cokerie, marque la ligne de front dans la zone.
En mars, une autre vidéo devenue virale montrait un soldat ukrainien, désarmé et prisonnier, lancer «gloire à l’Ukraine» avant d’être abattu. Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme avait à l’époque rappelé avoir «documenté de nombreuses violations du droit international humanitaire à l’encontre des prisonniers de guerre, y compris des cas d’exécutions sommaires de prisonniers de guerre russes et ukrainiens».