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Drame

Migrants : un double naufrage fait au moins onze morts et soixante disparus en Méditerranée

Méditerranéedossier
Selon les informations publiées par l’ONG allemande ResQship, ses équipes auraient réussi à secourir 51 passagers ce lundi matin au large de Lampedusa alors que le bateau était en train de couler. Un second sauvetage aurait été réalisé dans la nuit par les garde-côtes italiens.
Photo de la Guarda Costiera, les garde-côtes italiens, qui montre un voilier au large de la Calabre, le 17 juin 2024. (AFP)
publié le 17 juin 2024 à 15h37

Cela fait déjà plus de dix ans que les eaux de la Méditerranée ont été transformées en cimetière sous-marin, recueillant le corps des plus de 20 000 migrants morts noyés dans leur tentative de traversée vers l’Europe. Ce lundi 17 juin, ils sont au mois onze de plus à avoir trouvé la mort en cherchant à rejoindre les côtes italiennes. L’ONG de secours allemande ResQship a d’abord alerté ce matin sur la mort d’au moins dix personnes. Le Nadir, son voilier de 19 mètres de long qui opère en Méditerranée depuis 2021, a été le seul à se porter au secours d’une embarcation en détresse au large de l’île italienne de Lampedusa.

«Au total, 61 personnes se trouvaient à bord du bateau en bois, qui était plein d’eau. Notre équipage a réussi à évacuer 51 passagers, dont deux étaient inconscients. Nous avons dû les libérer [de la cale] avec une hache», explique l’ONG allemande dans un message posté sur X (ex-Twitter), photo de l’ouverture réalisée dans le pont de l’embarcation à l’appui. L’équipe de sauvetage est arrivée trop tard pour dix personnes. Elles se trouvaient dans la cale inondée.»

Courbe croissante de noyades

Un autre naufrage a été signalé dans la même zone par Sergio Scandura, journaliste pour Radio Radicale et vigie des naufrages en Méditerranée centrale. Selon ses informations, les garde-côtes italiens ont débarqué ce matin à Roccella Ionica, petite ville de Calabre située presque à la pointe de la botte italienne, avec onze survivants et un mort à bord. Ils auraient été secourus dans la nuit de dimanche à lundi, à l’extrémité est de la zone de secours italienne. Au moins 64 autres personnes, des Afghans, des Iraniens et des Kurdes irakiens, étaient à bord lors du naufrage et sont désormais portées disparus.

Dans cette zone de la Méditerranée centrale, qui court des côtes libyennes et tunisiennes au sud aux rivages italiens au nord, les naufrages sont particulièrement nombreux et meurtriers. Les migrants tentent de quitter la Libye et ses sinistres camps par tous les moyens. Ils prennent la mer dans des embarcations vieilles et surchargées, pilotées par des personnes sans expérience et presque systématiquement de nuit pour tenter d’échapper aux gardes-côtes libyens, financés par l’Union européenne pour faire la chasse aux clandestins. Même s’ils parviennent à atteindre les eaux européennes, ils ne sont pas plus en sécurité pour autant. Les gardes-côtes maltais ne portent que très rarement secours aux bateaux de migrants en détresse et les navires des ONG de secours sont rares et font face à des blocages administratifs de plus en plus récurrents.

Depuis le début de l’année, l’Organisation mondiale des migrations a déjà recensé au moins 923 décès, en très grande majorité en Méditerranée centrale. C’est un peu moins qu’en 2023, où 1 272 morts avaient été comptabilisés à la fin du mois de mai. Après une baisse en 2020, liée à la pandémie, le nombre de noyés n’a cessé d’augmenter ces dernières années, passant de 1449 en 2020 à 3 155 en 2023. L’année passée a notamment été marquée par le naufrage de Pylos, au large de la Grèce lors duquel 82 personnes sont mortes et plus de 500 ont été portées disparues, présumées mortes, après des manœuvres douteuses des garde-côtes grecs. Comme le rappelle l’équipage de ResQship sur X, «l’Europe forteresse tue».