«Il vient de se passer quelque chose à Enerhodar.» Artem (1) raccroche son téléphone d’un air inquiet. Jeudi à la mi-journée, cet ingénieur, qui travaillait jusqu’en juin dans la centrale nucléaire de Zaporijia, vient d’être averti qu’une coupure de courant géante affecte les territoires occupés par l’armée russe dans le sud de l’Ukraine. Les derniers réacteurs de la centrale, qui se trouve précisément dans la ville occupée d’Enerhodar, sont en cours d’arrêt, poursuit-il. «On va acheter de l’iode», lance l’exilé de l’intérieur, qui s’est établi dans la ville de Zaporijia, la capitale régionale toujours sous le contrôle de Kyiv, à une cinquantaine kilomètre de la centrale. Il trouvera les précieuses pastilles sans difficulté et sans ordonnance dès la seconde officine visitée.
Dans l’après-midi, un communiqué de l’autorité nucléaire ukrainienne Energoatom confirme les informations d’Artem, resté en contact étroit avec ses anciens collègues : «Les deux réacteurs en fonctionnement ont été déconnectés du réseau. En conséquence, les actions des envahisseurs ont provoqué une déconnexion totale de la centrale nucléaire de Zaporijia du réseau électrique.» Une première dans l’histoire de cette centrale progressivement entrée en service à partir de 1985. Elle est toujours la plus gran