Comme si le pape renonçait à sa papamobile, ou le général de Gaulle à sa DS… Le roi des Pays-Bas, Willem-Alexander, a annoncé ce jeudi dans une vidéo envoyée à toutes les rédactions du pays, et après consultation de son Premier ministre Mark Rutte, que le majestueux «Gouden Koets» ne serait plus utilisé par la famille royale. Ce carrosse doré était controversé depuis plusieurs années.
En 2011, deux députés néerlandais avaient estimé que le panneau Hommage aux colonies figurant sur le côté de cette calèche royale était raciste. Y figurent des esclaves à moitié nus, en position de soumission devant une allégorie de la monarchie. Dans ce pays au lourd passé colonial (l’empire néerlandais était un des plus étendus au XVIIe siècle), le sujet faisait polémique. Mais cette dernière s’était essoufflée depuis 2015, année à partir de laquelle le carrosse doré a commencé à ne plus être utilisé car il devait être restauré.
Son exposition dans la cour du Musée d’Amsterdam depuis juin et les interrogations croissantes sur la manière de commémorer le passé colonial dans le sillage du mouvement Black Lives Matter ont relancé le débat. Le monarque néerlandais a donc décidé de s’emparer de ce sujet : «Tant qu’il y aura des personnes vivant aux Pays-Bas qui ressentent quotidiennement la douleur de la discrimination, le passé fera encore de l’ombre sur notre présent», a-t-il déclaré ce jeudi.
«Chemin long et difficile»
Le roi Willem-Alexander a donc tranché et décidé que le carrosse de la famille royale depuis 1901 «ne reviendra pas lors du Prinsjesdag [cérémonie protocolaire qui se tient chaque troisième mardi du mois de septembre, ndlr]». Sa position par rapport au passé colonial est néanmoins mesurée : «Nous ne pouvons pas réécrire le passé. Nous pouvons essayer de nous en accommoder ensemble. Cela vaut aussi pour le passé colonial. Il ne sert à rien de condamner et de disqualifier ce qui s’est passé à travers le prisme de notre temps», développe-t-il dans sa vidéo. Il ne faut donc pas s’attendre à ce qu’il fasse déboulonner des statues.
En réalité, cette décision de ne plus faire rouler son carrosse est bien plus une invitation au débat qu’une condamnation du passé. Le monarque espère «parvenir à la réconciliation» avec les décoloniaux, préalable pour pouvoir réutiliser son véhicule doré. «Je sais que nous pouvons le faire, même si c’est un chemin long et difficile. Je comprends très bien les sentiments différents de chacun. Ce n’est que si nous empruntons ensemble ce chemin de la réconciliation que le carrosse doré pourra à nouveau rouler au Prinsjesdag», a-t-il déclaré.