Demi-tour, toute. Un mois après son arrivée au 10 Downing Street, la Première ministre britannique est déjà sur la sellette et se retrouve contrainte à sortir les rames pour tenter de sauver son poste. Liz Truss a annoncé ce vendredi qu’elle augmenterait finalement l’impôt sur les sociétés comme l’avait prévu le précédent gouvernement. Elle souhaitait jusqu’ici le baisser de 25 à 19 %. «Il est clair que certaines parties de notre mini-budget allaient trop loin et trop vite par rapport à ce que les marchés attendaient», a-t-elle reconnu dans une courte conférence de presse. Et de souligner sa «détermination» à «tenir [sa] promesse d’obtenir une croissance plus forte, un Royaume-Uni plus prospère». Et à «sortir de la tempête».
Récit
Un peu plus tôt, la Première ministre a annoncé le limogeage de son ministre des finances, Kwasi Kwarteng, remplacé dans la foulée par Jeremy Hunt. «Vous m’avez demandé de démissionner en tant que Chancelier» de l’Echiquier, «j’ai accepté», a écrit Kwasi Kwarteng dans une lettre à sa «collègue et amie» Liz Truss. «Je respecte profondément la décision que vous avez prise aujourd’hui», lui a répondu la cheffe du gouvernement dans une formulation qui laisse les observateurs perplexes. Downing Street a annoncé la nomination aux Finances de Jeremy Hunt, ancien candidat dans la course pour Downing Street. Âgé de 55 ans, il a été ministre des Affaires étrangères en 2018-2019, après avoir été celui de la Santé.
«Rassurer les marchés»
Le premier plan budgétaire de Liz Truss, annoncé le 23 septembre, prévoyait des dizaines de milliards de baisses d’impôt, sans moyens de financement clairs. Conséquence : les marchés ont été déstabilisés, la livre a chuté et le gouvernement s’est retrouvé profondément affaibli. Sur la sellette, Liz Truss espère que sa conférence de presse, les concessions présentées et le mini-remaniement «rassurent les marchés». Pas sûr que cela suffise. Dans la foulée de sa prise de parole, la livre accentuait encore son recul et le coût de la dette britannique, en repli depuis plusieurs jours, remontait légèrement. «Changer de Chancelier ne défait pas les dégâts qui ont déjà été faits», «nous avons besoin d’un changement de gouvernement», avait lâché avant la conférence de presse de Truss la responsable de l’opposition travailliste pour l’économie Rachel Reeves. «Seul le Labour offre le leadership et les idées pour sécuriser l’économie et sortir la Grande-Bretagne de ce bazar», a-t-elle tweeté.
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Durement fragilisée, la Première ministre, qui n’a répondu qu’à quatre questions de journalistes, s’est exprimée dans un contexte particulièrement tendu. Selon la presse britannique, certains députés de son camp sont déjà à la manœuvre pour l’évincer, face à des sondages désastreux prédisant une défaite cuisante de la majorité conservatrice lors des prochaines élections générales de 2024. La confiance politique est au plus bas. Alors que le congrès conservateur avait été marqué au début du mois par des tensions et des dissensions internes, certains élus conservateurs évoquent déjà en privé des noms pour remplacer Liz Truss.
Les Britanniques confrontés ces dernières semaines à des taux d’emprunt immobilier qui montent en flèche, s’ajoutant à une inflation à 10 %, perdent aussi patience. Selon un sondage YouGov, une société internationale de sondages et d’étude de marché basée sur Internet, 50 % des Britanniques veulent que le parti conservateur remplace Liz Truss et près de la moitié (43 %) des électeurs ayant voté pour le parti conservateur lors du dernier scrutin veulent un nouveau Premier ministre, selon un sondage YouGov.