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Libération
Faisceau d'indices

Sabotage des gazoducs Nord Stream : un mandat d’arrêt européen a été lancé par la justice allemande contre un Ukrainien

La justice allemande a émis en juin un mandat d’arrêt européen contre un moniteur de plongée ukrainien soupçonné d’être impliqué dans le sabotage des pipelines en mer Baltique en septembre 2022, ont révélé ce mercredi 14 août des médias allemands.
Le mandat d’arrêt européen a été émis en juin par le parquet fédéral allemand contre un moniteur de plongée ukrainien qui vivait alors en Pologne. (AFP)
publié le 14 août 2024 à 11h27

Le mystère Nord Stream bientôt percé à jour ? La justice allemande a lancé un mandat d’arrêt européen contre un Ukrainien soupçonné d’être lié au sabotage, en septembre 2022, des gazoducs Nord Stream 1 et 2 en mer Baltique, affirment ce mercredi 14 août plusieurs médias allemands.

Le mandat d’arrêt européen a été émis en juin par le parquet fédéral contre un moniteur de plongée ukrainien qui vivait alors en Pologne, non loin de Varsovie, ont rapporté la chaîne de télévision publique ARD et les journaux Süddeutsche Zeitung et Die Zeit. La justice le soupçonne d’avoir été impliqué, avec deux autres plongeurs ukrainiens, dans le sabotage et la pose des explosifs en profondeur sur le gazoduc, précisent-ils.

Le trio aurait posé les explosifs à bord d’un voilier nommé l’Andromède, envers lequel le parquet avait révélé en 2023 avoir ouvert une enquête. Selon les enquêteurs, l’embarcation serait partie de Rostock en Allemagne sur la mer Baltique, avant de faire escale sur une île danoise, en Suède et en Pologne.

En vertu des règles de l’entraide judiciaire européenne, les autorités polonaises avaient 60 jours pour réagir à la demande allemande et interpeller cette personne. Ce qui n’a pas été fait selon les médias, pour des raisons non explicitées. Le suspect semble avoir désormais pris la fuite, sans qu’on sache s’il s’est ou non rendu en Ukraine. En interne, les autorités allemandes s’étonnent du manque de coopération de la Pologne dans cette enquête, d’après les médias allemands, qui évoquent de possibles complicités dont aurait pu bénéficier le trio ukrainien dans ce pays.

Ce mercredi, le parquet polonais a confirmé avoir reçu en juin un mandat d’arrêt émis par l’Allemagne visant un Ukrainien établi en Pologne, lequel a depuis quitté le pays. Les autorités allemandes n’avaient pas inscrit le suspect dans le registre des personnes recherchées, ce qui a permis à l’intéressé de rentrer en Ukraine début juillet sans être inquiété par les autorités, a précisé le parquet polonais.

Le suspect, brièvement joint au téléphone par les médias allemands, a réfuté toute implication dans l’attentat. Interrogé par l’AFP, le parquet fédéral allemand, en charge d’un des volets de l’enquête sur cet attentat, n’a pas souhaité commenter.

L’Ukraine nie toute responsabilité

Alors que la Suède et le Danemark avaient déjà cessé d’enquêter sur cette affaire au début de l’année, les enquêteurs allemands ont poursuivi leurs investigations, visant notamment le voilier et les plongeurs ukrainiens. Selon les médias allemands, aucun élément à ce stade n’indique toutefois que ce plongeur et ses deux complices présumés ont agi sur ordre des autorités de leur pays, des services secrets ou de l’armée.

Tour à tour attribuée à la Russie, aux Etats-Unis ou à l’Ukraine – tous ont nié en bloc –, la responsabilité des explosions reste opaque, ce mystère faisant l’objet d’un véritable bras de fer géopolitique entre la Russie et l’Europe, sur fond de guerre en Ukraine. «Je ne ferais jamais cela», avait affirmé en juin 2023 le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, au quotidien allemand Bild, ajoutant qu’il «aimerait voir des preuves».

Dans une enquête publiée en novembre 2023, des médias américain et allemand avaient avancé que l’ex-commandant des forces spéciales ukrainiennes Roman Tchervinski – aujourd’hui en prison – aurait joué un rôle de premier plan dans les explosions sur les pipelines. En mars 2023, le New York Times avait affirmé, sur la base d’informations consultées par le renseignement américain, qu’un «groupe pro-ukrainien» serait à l’origine du sabotage, mais sans implication du président ukrainien.

Le 26 septembre 2022, quatre énormes fuites de gaz précédées d’explosions sous-marines avaient eu lieu à quelques heures d’intervalle sur Nord Stream 1 et 2, conduites reliant la Russie à l’Allemagne et acheminant l’essentiel du gaz russe vers l’Europe. Les gazoducs n’étaient pas en opération lors des fuites. Moscou avait déjà cessé de livrer du gaz via Nord Stream 1, sur fond de bras de fer énergétique avec les pays européens qui soutiennent l’Ukraine. Nord Stream 2 n’est, lui, jamais entré en service.