Menu
Libération
Mobilisation

Serbie : les manifestants anticorruption dressent des barricades partout dans le pays

De nouvelles protestations ont secoué Belgrade dans la nuit de dimanche à lundi. Les contestataires exigent des élections anticipées.
Une manifestation antigouvernementale, à Belgrade, le 29 juin 2025. (Marko Djurica/REUTERS)
publié le 30 juin 2025 à 8h05

En Serbie, des milliers de manifestants antigouvernementaux ont bloqué dans la nuit du dimanche 29 juin au lundi 30 juin plusieurs avenues de Belgrade, au lendemain d’un rassemblement géant pour réclamer des élections anticipées.

Samedi 28 juin, environ 140 000 personnes avaient défilé dans le centre de Belgrade, dernière manifestation antigouvernementale en date d’une série déclenchée par l’effondrement du toit d’une gare de la ville de Novi Sad en novembre. Une catastrophe qui avait fait seize morts et qui a été largement attribuée à la corruption généralisée.

Le mouvement anticorruption a lancé un appel à de nouvelles mobilisations après l’arrestation d’un «grand nombre de citoyens» en marge de la manifestation de samedi. Des milliers de personnes y ont répondu en dressant des barricades à travers Belgrade et d’autres villes.

Au carrefour névralgique d’Autokomanda, dans la capitale, les manifestants ont installé des tentes pour passer la nuit sur place. Les protestataires ont publié des images de barricades similaires dans plusieurs autres villes, dont Novi Sad, et ont annoncé des dizaines de rassemblements dans tout le pays. Les médias locaux et les vidéos publiées par les manifestants ont montré des foules se dirigeant vers les principaux ponts, et des étudiants dressant des barricades avec des poubelles et des clôtures.

77 arrestations

Le ministre serbe de l’Intérieur, Ivica Dacic, a déclaré à la chaîne locale RTV Pink que les autorités surveillaient la situation. Plus tôt dimanche, le président Aleksandar Vucic est resté défiant face aux demandes des manifestants pour des élections anticipées, accusant le mouvement dirigé par les étudiants de semer la «terreur». «La Serbie a gagné, et vous ne pouvez pas vaincre la Serbie par la violence comme certains l’ont voulu», a-t-il estimé dans un discours télévisé.

Samedi, les forces anti-émeutes ont fait usage de matraques et de gaz lacrymogènes pour disperser une foule qui leur lançait des bouteilles et des fusées éclairantes. En tout, 48 policiers ont été blessés, dont un grièvement, et 22 autres personnes ont été soignées pendant la manifestation, ont déclaré les autorités qui ont estimé la taille de la foule à 36 000 personnes, bien en dessous des 140 000 dénombrées par un organisme indépendant.

La police a annoncé 77 arrestations à la suite du rassemblement de samedi, et 38 personnes se trouvaient toujours en garde à vue dimanche. Par ailleurs, huit autres personnes ont été arrêtées dimanche, accusées notamment de planifier le blocage de routes et d’attaquer des institutions «dans le but de modifier violemment l’ordre étatique», a déclaré le parquet dans un communiqué.

«Ce n’est pas le moment de battre retraite», ont réagi les organisateurs de la protestation sur Instagram, encourageant les Serbes à se rassembler devant le bureau du procureur et à demander la libération des prisonniers. Au moins 2 000 personnes avaient répondu dimanche soir à cet appel.

«Il y aura beaucoup plus d’arrestations pour avoir attaqué la police… ce n’est pas la fin», a prévenu le président Aleksandar Vucic, affirmant qu’il n’y aura «aucune négociation avec les terroristes et ceux qui voulaient détruire l’Etat». «La vengeance ne doit pas être notre langage, mais la responsabilité doit faire partie de notre conscience», a-t-il encore appelé.

Ultimatum

Avant la manifestation de samedi, les organisateurs avaient lancé un «ultimatum» à Aleksandar Vucic pour qu’il convoque des élections – une demande qu’il a rejetée. Il a répété dimanche qu’il n’y aurait aucun scrutin avant fin 2026.

L’indignation suscitée par la catastrophe de Novi Sad a déjà conduit à la démission du Premier ministre et à un remaniement de l’administration. Aleksandar Vucic a répété à plusieurs reprises que les manifestations faisaient partie d’un complot étranger visant à renverser son gouvernement.