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Libération
Reportage

«S’il ne pleut pas d’ici l’été, je ne sais pas ce qu’on va devenir» : en Catalogne, le sauve-qui-peut de l’agriculture et du tourisme face à la sécheresse

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Confrontée à une aridité qui dure, la communauté autonome espagnole a décrété l’état d’urgence. Les deux secteurs les plus touchés tentent de s’organiser, sans aller jusqu’à repenser leur modèle.
Jordi Aulet (64 years old) is the president of the Baix Ter irrigation community. "The more tourists come to Barcelona each year, the more screwed we farmers will be." (Joan Alvado/Libération)
publié le 6 mars 2024 à 14h48

«On nous traite comme la dernière des merdes !» Grand et costaud, cheveu blanc cendré, Jordi Aulet Riera a beau avoir l’air jovial, un éclair de colère zèbre son regard quand il balaie ses vingt hectares de pommiers bien alignés. La propriété se situe au sortir de Torroella de Montgrí, dans le Bas-Ampurdan, au cœur du fertile delta du Ter, l’une des principales artères fluviales de la Catalogne. Alors que le crépuscule pointe, de gros nuages noirs ne déversent que quelques gouttelettes, une frustration trop connue dans une terre qui s’habitue à la sécheresse. Après cinquante ans de labeur, ce sexagénaire fils et petit-fils d’agriculteur pensait avoir tout bien fait, «avec application, méthode et passion». Grâce à un système d’arrosage dernier cri, il produit 700 tonnes de pommes par an dans la sobriété hydrique : «La numérisation permet de calculer précisément le taux d’humidité du sous-sol et de déclencher, si besoin, le goutte-à-goutte. Je peux vous dire qu’on ne perd pas un millilitre d’eau. Mais voilà, tout cela c’est une Ferrari sans essence.»

L’eau est le nouveau pétrole d’une Catalogne asséchée. Et