Dans cette guerre-là, plus personne n’ose demander un cessez-le-feu. Longue de plus de mille kilomètres, la ligne de front entre les deux armées a à peine bougé depuis la fameuse contre-offensive ukrainienne de juin, l’attaque éclair qui était censée rendre à Kyiv ses territoires envahis par l’armée russe, sinon lui permettre de reconquérir la Crimée. Mais rien ne s’est passé comme prévu.
Tandis qu’elle s’apprête à combattre un nouvel hiver, l’armée ukrainienne doit sans cesse regarnir ses unités : elle aurait déjà eu au moins 200 000 morts et blessés depuis l’invasion russe du 24 février 2022. A des années-lumière d’ici, et pourtant à moins de 2 000 km à vol d’oiseau, une autre guerre attire l’attention des grands de ce monde, des médias, des ONG, des chancelleries, des opinions publiques et surtout de l’oncle Sam. Joe Biden a eu beau affirmer son soutien «à deux démocraties attaquées par leurs voisins», l’attaque meurtrière du Hamas profite essentiellement à Vladimir Poutine, qui partage avec l’organisation palestinienne une alliance militaire avec l’Iran.
Poutine s’est d’ailleurs empressé de condamner Israël et de comparer le blocus israélien de Gaza au siège de Leningrad par les nazis lors de la Seconde Guerre mondiale. Plus personne ne lui demande un cessez-le-feu qu’il n’a de toute façon aucune intention d’accorder, plus personne ne publie le bilan des civils de Zaporijia et de Kharkiv tués cette semaine encore par ses missiles. Combien de vies ukrainiennes auraient été sauvées si Volodymyr Zelensky avait obtenu les missiles américains, les chars européens, le Dôme de fer israélien qu’il réclamait ? Nous ne le saurons pas. Nos journalistes sur place ont juste pu constater le désarroi des Ukrainiens face à une guerre qui n’en finit pas, et qu’on n’ose pas encore appeler défaite. Si ses alliés occidentaux ne se ressaisissent pas, l’Ukraine va connaître un terrible hiver de plus.