En résumé
- L’Estonie a dénoncé vendredi 19 septembre une «violation sans précédent» de son espace aérien par trois avions de combat russe.
- Il s’agit du troisième pays de l’Otan en moins de deux semaines à faire état d’une incursion russe dans son espace aérien, après la Pologne, dans la nuit du mardi 9 au mercredi 10 septembre, et la Roumanie, dimanche 14 septembre. Mais ces deux derniers pays avaient fait état, eux, de drones.
- Pour les deux dernières incursions, la Russie avait nié toute intention malveillante. L’Otan avait de son côté annoncé lancer une opération pour renforcer sa posture «le long de son flanc oriental». Retrouvez notre récit de cette journée ici.
Le survol des trois MiG-31 russes dans le ciel de l’Estonie ? Une «provocation» qui s’ajoute à une longue liste d’incidents, selon l’ancien chef d’état-major de l’Armée de l’air, Jean-Paul Paloméros.
Après l’incursion de «drones russes» dans son espace aérien, l’Estonie compte lancer des consultations à propos de l’application de l’article 4 du traité de l’Otan. Celui-ci prévoit que tout membre de l’Alliance peut demander des consultations lorsque son intégrité territoriale, son indépendance ou sa sécurité est menacée. Contrairement à l’article 5, qui engage une réponse collective en cas d’attaque armée, il n’entraîne pas automatiquement d’action militaire : il oblige les Alliés à se réunir en urgence pour évaluer la situation, partager des informations et envisager des mesures communes. Depuis 1949, l’article 4 n’a été invoqué qu’à sept reprises, principalement par la Turquie face à la menace de la guerre en Irak (2003), celle du conflit syrien (entre 2012 et 2020) ou lors d’attentats terroristes (2015). La Pologne y a eu eu recours la semaine dernière, après l’incursion de drones présumés russes.
La France, qui dispose d’un bataillon comprenant des avions de combat, basé en Estonie, a qualifié les incursions d’avions de guerre russes de «incursion dangereuse et irresponsable». «Cette incursion en Estonie est sans précédent depuis plus de 20 ans», a ajouté le ministère des Affaires étrangères. «La France condamne avec la plus grande fermeté» cette intrusion dans «l’espace aérien d’un Etat membre de l’Union européenne et d’un allié de l’Otan […] en violation flagrante du droit international», a également affirmé le porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a déclaré que l’Otan était «toujours prête à se défendre», sur X. Il a ajouté que la violation de l’espace aérien estonien par la Russie était inacceptable et que l’Estonie bénéficiait du soutien total de l’Allemagne.
A l’instar de la Pologne la semaine dernière après l’intrusion de drones présumés russes dans son ciel, le Premier ministre estonien annonce que son pays va demander à l’Otan d’activer l’Article 4 du traité Atlantique qui prévoit des consultations entre alliés en cas de menace sur l’un de ses membres, suite à l’incursion de trois avions russes dans son espace aérien. «Une telle violation est totalement inacceptable. Le gouvernement de l’Estonie a décidé de demander des consultations en vertu de l’article 4 de l’Otan», a écrit Kristen Michal sur X.
Les gardes-frontières polonais rapportent une autre incursion de deux avions de combat russes à l’intérieur de la zone de sécurité de Petrobaltic, une plateforme de forage en mer Baltique. «Deux avions de combat russes ont effectué un passage à basse altitude au-dessus de la plateforme Petrobaltic en mer Baltique», ont écrit sur X les gardes-frontières polonais. La semaine dernière, la Pologne a abattu des drones russes présumés dans son espace aérien avec le soutien de l’Otan.
Analyse
Au tour de l’Ukraine de réagir à l’intrusion russe dans le ciel estonien. «L’incursion […] constitue une nouvelle escalade de la part de la Russie et une menace directe pour la sécurité transatlantique», a affirmé sur X le chef de la diplomatie ukrainienne, Andriï Sybiga. «Tant qu’elle ne recevra pas de réponse vraiment forte, (la Russie) ne fera que devenir plus arrogante et agressive», a assuré Andriï Sybiga.
Les dirigeants de l’UE discuteront de la «réponse collective» qu’ils vont apporter aux multiples violations russes de l’espace aérien européen lors de leur prochaine réunion à Copenhague le 1er octobre, a déclaré ce vendredi le président du Conseil européen, António Costa. «La violation aujourd’hui de l’espace aérien estonien par trois avions militaires russes est une nouvelle provocation inacceptable», a-t-il condamné sur X, ajoutant : «Elle souligne une fois de plus la nécessité urgente de renforcer notre flanc oriental, d’approfondir la coopération européenne en matière de défense et d’intensifier la pression sur la Russie.»
Profil
Petit pays du nord-est de l’Europe, l’Estonie est très directement touché par les visées expansionnistes de Moscou. En tant que voisin, déjà, avec 324 kilomètres de frontières en commun avec la Russie, mais aussi en tant que pays de l’UE hébergeant la plus forte proportion de population russe (300 000 personnes pour 1,3 million d’habitants, soit un petit quart de la population). En 2024, Libé s’était rendu dans l’ancienne république soviétique, y faisant le constat de la méfiance suscitée par la communauté russe dans le reste du pays. Notre reportage
Selon l’armée estonienne, la violation s’est déroulée du côté de l’île Vaindloo, à une centaine de kilomètres de Tallinn, la capitale du pays. Les chasseurs n’avaient pas de plan de vol et n’étaient pas en contact avec un contrôleur aérien. Au regard de la longueur inhabituelle de l’incursion, «il est difficile d’imaginer comment cela pourrait ne pas être intentionnel», a réagi une source américaine auprès de Reuters.
La présidente de la Commission européenne a réagi à l’incursion russe dans le ciel estonien en assurant que «l’Europe se tient aux côtés de l’Estonie pour faire face à la dernière violation russe de son espace aérien». Elle a assuré que l’UE «répondra à chaque provocation avec détermination tout en renforçant son flanc oriental». Alors que la Commission a présenté ce vendredi un 19e train de sanctions contre la Russie, elle a appelé les leaders de chaque pays-membre à l’adopter au plus vite.
Avec au moins 550 avions de combat en service d’ici dix ans sur le continent, l’Europe reste très dépendante de la maintenance gérée depuis la Floride. Un fil à la patte que les Etats de l’Otan réfléchissent à détricoter, le Portugal reportant sa décision de remplacer ses F-16 par des F-35. Notre article
L’Otan a intercepté vendredi les avions de combat russes ayant «violé» l’espace aérien estonien, dénonçant un «nouvel exemple de comportement russe dangereux», a indiqué sa porte-parole Allison Hart. «Plus tôt aujourd’hui, des chasseurs russes ont violé l’espace aérien estonien. L’Otan a réagi immédiatement et a intercepté les avions russes», a-t-elle précisé sur X. Selon l’armée estonienne, ce sont des F35 italiens qui ont procédé à l’interception.
La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas, par ailleurs ancienne Première ministre de l’Estonie, a dénoncé vendredi une «provocation extrêmement dangereuse». «Cela marque la troisième violation de l’espace aérien de l’UE en quelques jours et accroît encore les tensions dans la région», a-t-elle déclaré sur X.
Le ministère estonien a indiqué avoir convoqué le chargé d’affaires de l’ambassade de Russie pour protester contre cette violation. Les pays baltes, tous soutiens fermes de l’Ukraine, mais ne disposant pas de leurs propres avions de combat, ont confié la police de leur ciel à d’autres alliés de l’Otan qui assument cette tâche à tour de rôle. Depuis août, la mission est assurée par l’aviation italienne.
«La Russie a déjà violé l’espace aérien estonien à quatre reprises cette année, ce qui est en soi inacceptable. Mais l’incursion d’aujourd’hui, impliquant trois avions de chasse […] est d’une audace sans précédent», a déclaré le chef de la diplomatie estonienne Margus Tsahkna cité dans le communiqué. Ces incursions avaient eu 13 mai, le 22 juin et le 7 septembre. «De tels actes ne peuvent être tolérés et doivent être sanctionnés par des mesures politiques et économiques rapides», a encore déclaré le ministre sur X.
Le ministère estonien des Affaires étrangères a dénoncé vendredi la violation de l’espace aérien de ce pays balte, membre de l’UE et de l’Otan, par trois avions de combat russes. «L’incursion a eu lieu au-dessus du golfe de Finlande, où trois avions de chasse MIG-31 de la Fédération de Russie sont entrés dans l’espace aérien estonien […] et y sont restés pendant un total de 12 minutes», a indiqué le ministère dans un communiqué.