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Défense

Face à l’offensive russe, les pays d’Europe de l’Est appellent l’Otan au secours

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
En réaction à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Pologne, la Roumanie et les pays baltes invoquent l’article 4 du traité constitutif de l’alliance politico-militaire, possible préalable à une riposte.
Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, jeudi à Bruxelles. (yves herman/REUTERS)
publié le 24 février 2022 à 16h45

L’inquiétude se propage en Europe de l’Est dans la foulée de l’offensive lancée par la Russie contre l’Ukraine dans la nuit. Pendant que les chars russes franchissent la frontière et que des bombardements frappent plusieurs grandes villes du pays, Kiev compris, la Pologne, la Roumanie, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie annoncent ce jeudi leur décision d’invoquer l’article 4 du traité constitutif de l’Otan, possible préalable à une riposte de l’alliance militaire.

«L’agression généralisée de la Russie est une menace pour le monde entier et pour tous les pays de l’Otan», explique dans un communiqué la Première ministre estonienne Kaja Kallas. L’opération militaire «pourrait avoir des effets directs et indirects sur tous les pays européens», alerte-t-elle, tout en précisant que la situation aux frontières de l’Estonie est «calme». De son côté, la Lituanie a déclaré l’état d’urgence pour «faire face à la menace grave qui pèse sur la sécurité publique», selon l’expression du président Gitanas Nauseda.

Consultations

Concrètement, l’article 4 du traité de l’Atlantique Nord prévoit que les membres puissent se consulter «chaque fois que, de l’avis de [l’un d’eux], l’intégrité territoriale, l’indépendance politique ou la sécurité de l’une des parties sera menacée». Son activation a donc eu pour conséquence immédiate une réunion en urgence des 30 ambassadeurs de l’Otan à Bruxelles, avant le sommet en visioconférence qui doit se tenir vendredi.

L’article 4 ne comprend pas de dimension militaire, au contraire de l’article 5 qui stipule qu’une attaque armée contre l’un de ses membres est «considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties» et ouvre la voie à «l’emploi de la force armée». Cette dernière disposition ne s’applique pas dans les circonstances actuelles, car l’Ukraine n’est pas membre de l’Otan. «L’Otan n’a pas de troupes en Ukraine et n’a aucun plan ni aucune intention de déployer des troupes dans ce pays», a confirmé son secrétaire général, Jens Stoltenberg, à l’issue de la réunion de ce jeudi. Pour autant, l’organisation fondée en 1949 «n’est pas limitée à la défense d’un Etat membre», rappelait, à Libération, Pierre Haroche, chercheur sur la sécurité européenne à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire (Irsem), citant les exemples des opérations au Kosovo en 1999, en Afghanistan après 2001 ou en Libye en 2011. Par ailleurs, plusieurs capitales, dont Washington et Londres, fournissent cependant du matériel militaire aux autorités ukrainiennes.

Sanctions d’envergure

Ces derniers jours, la riposte occidentale aux agissements de Moscou avait essentiellement pris la forme de modestes sanctions économiques. A la suite de la reconnaissance par la Russie de l’indépendance des territoires séparatistes de l’est de l’Ukraine, lundi, les Etats-Unis avaient annoncé des mesures contre les «élites russes» et plusieurs institutions financières. Bruxelles avait proposé d’interdire aux autorités russes d’accéder aux marchés et services financiers européens et Berlin, de son côté, était allé jusqu’à suspendre l’autorisation du gazoduc Nord Stream 2 reliant la Russie et l’Allemagne.

Des sanctions d’envergure devraient être prononcées dans les prochaines heures. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a d’ores et déjà prévenu que la Russie devrait «rendre des comptes». Selon le site officiel de l’Otan, l’article 4 a déjà été invoqué à six reprises par le passé. Le précédent le plus récent remonte au mois de février 2020, lorsque la Turquie avait sollicité l’alliance militaire pour trouver une issue à des affrontements avec la Syrie qui avaient causé la mort de plusieurs dizaines de ses soldats.