Les rangées de bouteilles d’eau minérale, les cakes moelleux, les baigneurs de retour de la plage croisés dans l’ascenseur, les professionnels de l’hasbara (la propagande, en hébreu) à l’accent américain qui refilent leurs numéros de portable à qui en voudra : tout dans cette conférence de presse, au deuxième étage de l’hôtel Carlton de Tel-Aviv, semble si familier, si normal. Atrocement normal. Loin de l’horreur des kibboutz suppliciés du pourtour de Gaza et des champs transformés en charnier. Mais, derrière ce pupitre où sont apposées les photos de disparus franco-israéliens, il suffit d’un mot tremblant, d’une larme brûlante, d’un hoquet qui vaut tous les hurlements pour être plongé au cœur de l’horreur.
Il y a Doron Journo, solide gaillard au français chancelant et sa fille Meitav, à l’anglais rageur, précis comme un scalpel. Ils sont sans nouvelles de Karine, leur fille et sœur, depuis samedi 7 octobre au matin et ce message, à 8h42 : «La famille, si je ne rentre pas à la maison, je vous aime.» Suivra un appel de quelques secondes mêlant cris et détonations. Comme des centaines d’autres, Karine Journo n’aurait raté