Pour faire face «aux pires coupes financières qui ont jamais frappé le secteur humanitaire», l’Organisation des Nations unies a annoncé ce lundi 16 juin une réduction drastique de l’aide mondiale pour cette année. Cette mesure, qui va laisser des dizaines de millions de personnes en détresse, est en grande partie due au retrait brutal des Etats-Unis de plusieurs instances de l’ONU – annoncé en février par un décret exécutif, signé par Donald Trump.
Le nouveau plan de 29 milliards de dollars, là où l’ONU en réclamait 44 milliards pour 2025, doit «hyper-prioriser» l’aide pour 114 millions de personnes, selon le communiqué diffusé par l’Agence de coordination de l’aide humanitaire de l’ONU (Ocha). Le plan initial devait permettre d’aider «180 millions de personnes vulnérables». Selon l’Ocha, l’ONU n’a réussi à récolter que 5,6 milliards de dollars, sur les 44 milliards initialement réclamés, soit 13 % du total. Pourtant, les crises humanitaires ne cessent de se multiplier : Gaza, Soudan, république démocratique du Congo, Birmanie, Ukraine notamment.
Coupes brutales
Tout le secteur humanitaire mondial a été jeté dans la tourmente par la décision du président américain Donald Trump de mettre fin ou de revoir à la baisse l’aide financière à l’étranger des Etats-Unis. Washington était jusque-là le principal donateur en termes d’aide au développement sous toutes ses formes et les coupes brutales du financement ont des conséquences dramatiques pour l’aide d’urgence, la vaccination ou encore la distribution de médicament pour lutter contre le sida. Les fonds américains représentaient parfois une part importante des budgets des agences de l’ONU ou de diverses ONG. Et ces pertes sont impossibles à compenser en quelques semaines ou même quelques mois.
Le patron de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, parmi de nombreux autres, a alors dénoncé une décision qui pourrait coûter la vie à des millions de gens. Début mai, le Programme alimentaire mondial avait ainsi tiré la sonnette d’alarme sur l’aggravation de la faim en Afrique de l’ouest et centrale. L’agence des Nations unies avait évoqué fin mars une «crise sans précédent» due à la baisse de 40 % de ses financements pour l’année 2025. Au Bangladesh, c’est la lutte contre la tuberculose et son éradication qui ont été remises en cause. Dans le plus grand camp de migrants et de peuples autochtones de Colombie, dans le désert de la Guajira (nord-est) du pays, seules 3 ONG sur 28 étaient encore en mesure d’aider au mois de mai.
«Tri de la survie humaine»
«Nous avons été forcés de faire un tri de la survie humaine», a dénoncé Tom Fletcher, le chef des affaires humanitaires de l’ONU. «Les comptes sont cruels, et les conséquences sont déchirantes. Trop de personnes ne recevront pas l’aide dont elles ont besoin, mais nous sauverons autant de vies que possible avec les ressources qui nous sont données», a-t-il promis.
Pour faire «autant que possible» avec beaucoup moins, l’ONU veut mettre l’accent sur deux objectifs clés : atteindre les personnes et les endroits confrontés aux besoins les plus urgents et s’appuyer sur les plans d’aide déjà établis pour que les ressources limitées soient dirigées là où elles peuvent être les plus utiles – le plus rapidement possible. L’ONU va se baser sur une échelle qui classe la gravité des besoins humanitaires. Les zones classées niveau 4 ou 5 – «indiquant des conditions extrêmes ou catastrophiques» auront la priorité. Pour gagner en souplesse et en rapidité, l’assistance sera apportée en espèces lorsque cela sera possible, afin de «permettre aux personnes de choisir ce dont elles ont le plus besoin». «Des coupes budgétaires brutales nous laissent avec des choix brutaux», reconnaît Tom Fletcher.