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Libération
En froid

Guerre à Gaza : le cofondateur de Ben & Jerry’s démissionne après des désaccords avec sa société mère

Jerry Greenfield s’est retiré mardi soir de l’entreprise américaine de crème glacée qu’il avait cofondée il y a près de cinquante ans, sur fond de divergences autour des «valeurs» avec Unilever.

Jerry Greenfield et Ben Cohen lors d'une distribution de glaces à Philadelphie, en septembre 2024, alors qu'ils militaient les démocrates. (Lisa Lake/Getty Images. AFP)
Publié le 17/09/2025 à 15h30

«C’est avec le cœur brisé que j’ai décidé que je ne pouvais plus, en toute conscience, et après quarante-sept ans, rester un employé de Ben & Jerry’s» , a annoncé Jerry Greenfield dans une lettre postée mardi soir sur X par son associé Ben Cohen. Il reproche à la société mère de l’entreprise, Unilever, de restreindre l’engagement de Ben & Jerry’s, notamment auprès de la cause palestinienne.

Rachetée en 2000 par Unilever, la célèbre marque de glaces fondée en 1978 dans une ancienne station-service du Vermont a toujours revendiqué son engagement en faveur de la protection de l’écologie, du respect des droits humains ou de la question des inégalités. Mais depuis 2021, Ben & Jerry’s et la multinationale anglo-néerlandaise accumulent les désaccords, notamment autour de la guerre à Gaza. Le fossé avait commencé à franchement se creuser lorsqu’en 2022 l’entreprise n’était pas parvenue à empêcher Unilever de vendre ses glaces dans les colonies de Cisjordanie, ce qui, affirmait-elle, était contraire à ses valeurs. Encore en mai dernier, Ben Cohen était expulsé d’une audition parlementaire au Capitole, lors de laquelle il avait dénoncé le soutien américain à Israël.

Une entreprise «réduite au silence»

Jerry Greenfield a déclaré qu’il ne pouvait plus continuer à travailler dans une entreprise qui avait été «réduite au silence, mise à l’écart par crainte de contrarier le pouvoir» à un moment où l’administration américaine «s’attaque aux droits civiques, au droit de vote, aux droits des immigrants, des femmes et de la communauté LGBT +».

Lors de son rachat, Ben & Jerry’s s‘était expressément réservé le droit de préserver son «intégrité» avec un conseil d’administration indépendant. «Il est profondément décevant de constater que cette indépendance, fondement même de notre vente à Unilever, a disparu», ajoute Greenfield dans sa lettre ouverte.

«Libérer Ben & Jerry’s»

Le départ de Greenfield intervient alors que Ben & Jerry’s tentait de reprendre son indépendance, en profitant de l’introduction en Bourse au mois de novembre de la nouvelle structure d’Unilever, The Magnum Ice Cream Company (TMICC). Sous cette bannière, Unilever entend faire fonctionner son activité glaces de manière autonome.

Dans une lettre ouverte, Ben Cohen et Jerry Greenfield avaient déclaré la semaine dernière que TMICC devait «libérer Ben & Jerry’s». Le nouveau PDG de Magnum, Peter tel Kulve, a rejeté cette demande et un porte-parole de TMICC a précisé que Ben & Jerry’s n’était pas à vendre.

«Nous ne partageons pas le point de vue de M. Greenfield et avons souhaité engager un dialogue constructif avec les deux cofondateurs sur la manière de renforcer la position forte de Ben & Jerry’s dans le monde, fondée sur ses valeurs», a affirmé un autre représentant de TMICC.