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Libération
Diplomatie des otages

Iran : Olivier Vandecasteele, un humanitaire belge condamné à 28 ans de prison

Un traité belgo-iranien qui prévoyait sa libération, en échange de l’extradition d’un diplomate iranien condamné en Belgique pour terrorisme, a été suspendu par la Cour constitutionnelle belge. Sa famille se dit «anéantie».
Arrêté en février, Olivier Vandecasteele est détenu depuis à l’isolement dans une cellule de la sinistre prison d’Evin à Téhéran. Il a entamé une grève de la faim il y a un mois. (AFP)
publié le 15 décembre 2022 à 18h38

Sa famille l’a appris mardi, lors d’une rencontre avec des membres du gouvernement belge : Olivier Vandecasteele, travailleur humanitaire de 41 ans, a été condamné à 28 ans de prison par un tribunal iranien, sans que l’on connaisse les charges retenues contre lui. Arrêté en février, il est détenu depuis à l’isolement dans une cellule de la sinistre prison d’Evin à Téhéran. Il a entamé une grève de la faim il y a un mois.

Olivier Vandecasteele est un humanitaire expérimenté. Il a travaillé en Afghanistan et au Mali pour Médecins du monde, avant d’être envoyé en Iran pour Norwegian Refugee Council puis pour Relief International. Il y travaillait depuis plus de six ans lorsqu’il a été arrêté. «Depuis 290 jours, il est coupé de tout contact humain. […] Les jours passent et notre famille se décompose. Nous sommes tristes, anéantis, les bras et jambes coupés par cette injustice», a déclaré sa sœur, Nathalie Vandecasteele, la semaine dernière, dénonçant la «torture psychologique innommable» subie par son frère, «otage innocent d’une bataille juridico-politique» qui met aux prises l’Iran et la Belgique.

Un traité de transfert signé en mars entre les deux pays aurait permis de libérer Olivier Vandecasteele en échange du renvoi en Iran du diplomate iranien Assadollah Assadi, condamné en Belgique à 20 ans de prison pour un projet d’attentat contre un rassemblement d’opposants iraniens en France, à l’été 2018, avorté de justesse par la police belge. Considéré comme un agent du renseignement iranien, Assadi a été reconnu coupable en février 2021 de «tentatives d’assassinat à caractère terroriste».

«Pas de plan B»

Approuvé fin juillet par le Parlement belge, puis ratifié mi-novembre par le président iranien Ebrahim Raïssi, ce traité belgo-iranien, vivement critiqué par des opposants iraniens en exil, a été suspendu le 8 décembre par la Cour constitutionnelle belge. Première étape avant une possible censure du texte, sur laquelle la Cour devra se prononcer dans les trois mois. Dans son arrêt, elle a donné raison aux opposants iraniens en exil, estimant que ce traité, en permettant la libération d’un homme condamné pour des faits de terrorisme, représentait pour eux «un risque de préjudice grave et difficilement réparable».

«Extrêmement déçus», les proches d’Olivier Vandecasteele ont déploré que cet arrêt du tribunal constitutionnel mette «en échec tout l’échafaudage construit par le gouvernement belge». «Il n’y a pas de plan B, a déclaré jeudi le porte-parole de la famille, Olivier Van Steirtegem. Vous imaginez ? S’il n’y a pas une solution, il va rester en prison jusqu’au 2050, il aura presque 70 ans.» Le gouvernement belge a confirmé à la famille que le traité de transfert constituait la seule option pour libérer Olivier Vandecasteele.

La Belgique n’est pas le seul pays victime la «diplomatie des otages» pratiquée par l’Iran – mais aussi par la Russie, à l’image de la basketteuse américaine Brittney Griner, arrêtée en février à Moscou et échangée la semaine dernière contre le marchand d’armes russe Viktor Bout. Cinq ressortissants français sont ainsi retenus en Iran, indiquait mi-octobre le Quai d’Orsay : la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, arrêtée en juin 2019 puis condamnée à 5 ans de prison pour «atteinte à la sécurité nationale», Benjamin Brière, arrêté en mai 2020 et condamné à 8 ans et 8 mois d’emprisonnement pour «espionnage», et deux syndicalistes, Cécile Kohler et Jacques Paris, arrêtés en mai. L’identité de la cinquième personne demeure inconnue.