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Tensions

L’Azerbaïdjan mène des exercices militaires avec la Turquie près de l’Arménie

Ces manœuvres doivent se dérouler dans l’enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan, frontalière de l’Arménie et de l’Iran, dans un contexte de tensions entre Bakou et Erevan.
Un officier azerbaïdanais montre les armes des forces arméniennes qui se sont rendues au Haut-Karabakh, le 1er octobre. (Aziz Karimov/AP)
publié le 23 octobre 2023 à 16h01

Le ministère azerbaïdjanais de la Défense a annoncé ce lundi 23 octobre le début d’exercices militaires conjoints avec la Turquie près de l’Arménie, dans un contexte de tensions entre Bakou et Erevan après la reconquête azerbaïdjanaise de la région du Haut-Karabakh. Parallèlement, les chefs des diplomaties arménienne, azerbaïdjanaise, russe, turque et iranienne ont rendez-vous à Téhéran pour une réunion censée aider à apaiser les relations entre les deux pays du Caucase.

Selon le ministère azerbaïdjanais, les manœuvres militaires sont organisées à Bakou, dans l’enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan, frontalière de l’Arménie et de l’Iran, ainsi que dans des «territoires libérés», dont la localisation n’a pas été précisée et qui pourraient désigner le Karabakh ou des districts azerbaïdjanais mitoyens.

Ces exercices mobiliseront jusqu’à 3 000 soldats des deux pays, des dizaines de véhicules blindés, de l’artillerie et une vingtaine d’aéronefs, a précisé le ministère. Leur but est «d’assurer la cohérence en combat», «d’améliorer le commandement», ainsi que le «professionnalisme des troupes», stipule l’Azerbaïdjan. Les soldats doivent s’exercer à l’usage de l’artillerie et de l’aviation, à la construction de pontons et à des parachutages en territoire ennemi, a encore ajouté le ministère.

La France «extrêmement vigilante»

Après l’annonce de ces exercices, la France s’est dite «extrêmement vigilante» face aux potentielles menaces pour l’intégrité territoriale de l’Arménie. Pour rappel, l’Azerbaïdjan et l’Arménie se vouent une haine tenace, et les tensions ont connu un regain avec la reconquête militaire éclair du Karabakh par l’Azerbaïdjan fin septembre, alors que la région était depuis une trentaine d’années sous le contrôle de séparatistes arméniens. La quasi-totalité de la population – plus de 100 000 personnes sur les 120 000 officiellement recensés – a fui en Arménie.

Avant cela, l’Azerbaïdjan et l’Arménie s’étaient opposés lors de deux guerres pour le contrôle de cet enclave montagneuse, l’une dans les années 1990 à la dislocation de l’URSS, l’autre à l’automne 2020, remportée par Bakou. Erevan craint désormais que son voisin, plus riche, mieux armé et soutenu par la Turquie, cherche à pousser son avantage. L’Arménie a notamment peur que l’Azerbaïdjan soit tenté de relier par la force l’enclave du Nakhitchevan à son territoire en attaquant le Sud arménien. Jusqu’ici, aucun accord n’a été trouvé entre les deux pays.

Les chefs des diplomaties arménienne, azerbaïdjanaise, russe, turque et iranienne doivent d’ailleurs se réunir ce lundi à Téhéran. Ils ont prévu d’évoquer les «pourparlers de paix» entre Erevan et Bakou, selon l’agence iranienne Irna. Ce format de réunion a pour objectif de «régler les problèmes de la région […] sans l’interférence de pays extrarégionaux et occidentaux», d’après l’agence.

L’Arménie semble prête à se tourner vers l’Occident

La Turquie, soutien de l’Azerbaïdjan, et la Russie, vue comme l’alliée de l’Arménie, jouent un rôle majeur dans la région. Mais la récente offensive au Haut-Karabakh a rebattu les cartes. Erevan a accusé Moscou de l’avoir abandonné en n’arrêtant pas les forces azerbaïdjanaises, ce que la Russie nie. A la recherche de protection, l’Arménie semble donc prête à se tourner davantage vers l’Occident.

Le pays a par exemple ratifié mi-octobre son adhésion à la Cour pénale internationale (CPI), ce qu’elle espère être un bouclier supplémentaire contre les potentielles ambitions de l’Azerbaïdjan. Un geste vu d’un très mauvais œil par Moscou, la CPI ayant émis au printemps un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine pour la «déportation» d’enfants ukrainiens vers la Russie, ce que Moscou nie inlassablement.