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Justice

Le haut fonctionnaire du Sénat soupçonné de livrer des informations à la Corée du Nord a bénéficié d’un non-lieu

Fasciné par la dictature nord-coréenne et mis en examen en 2018 pour «trahison», Benoît Quennedey a finalement bénéficié d’un non-lieu de la part de la justice.
Le haut fonctionnaire Benoît Quennedey, en novembre 2017, à Paris. (AFP)
publié le 2 juin 2022 à 13h07

Le dénouement d’une affaire aux airs de roman d’espionnage ? L’ancien administrateur du Sénat Benoît Quennedey, soupçonné d’espionnage au profit de la Corée du Nord et mis en examen en 2018, a finalement bénéficié d’un non-lieu, rapporte l’AFP confirmant une information du Parisien. Les juges d’instruction ont décidé d’abandonner les poursuites à l’encontre du haut fonctionnaire. Le Sénat a confirmé, de son côté, sa réintégration.

En novembre 2018, Benoît Quennedey, un énarque passionné par la patrie de Kim Jong-un, avait été mis en examen pour «trahison par livraison d’informations à une puissance étrangère» et «intelligence avec une puissance étrangère». Des accusations graves, passibles (pour la seconde) de trente ans de réclusion. Passé par les locaux de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Levallois-Perret, le haut fonctionnaire avait été placé sous contrôle judiciaire, avec, entre autres, l’interdiction d’exercer sa profession.

«Cette histoire est totalement loufoque»

Son bureau rue de Vaugirard avait été perquisitionné, de même que son domicile parisien et celui de ses parents à Dijon. Selon Libération, Benoît Quennedey était alors étroitement surveillé depuis un an. Le profil du haut fonctionnaire, âgé de 42 ans à l’époque et militant au Parti radical de gauche (PRG) intriguait les enquêteurs. Diplômé de Sciences Po Paris et ancien élève de l’ENA, cet homme d’une quarantaine d’années, qui préside l’Association d’amitié franco-coréenne, a publié plusieurs ouvrages consacrés à la Corée du Nord. Au moment de sa mise en examen, il exerçait en tant qu’administrateur de la Direction de l’architecture, du patrimoine et des jardins de la chambre haute du Parlement, chargé de la division administrative et financière.

Celui qui n’avait vraiment caché ses sympathies pour le régime nord-coréen était-il capable de livrer des informations confidentielles à Pyongyang ? Auprès de Libé, son éditeur d’alors, Aymeric Monville, s’insurgeait : «Cette histoire est totalement loufoque. Benoît n’est pas en mesure de détenir le moindre secret classifié. Il est énarque, mais pas du tout dans les hautes sphères. C’est ridicule.»

Une «affaire digne d’une mauvaise série d’espionnage», grince aujourd’hui son avocat, Florian Lastelle. «La prétendue trahison n’était que l’intérêt d’un esprit intelligent et curieux pour des régimes et des populations que l’on traite avec automatisme spectaculaire, sans les étudier», a-t-il réagi. Benoît Quennedey «retrouve son honneur, son métier, son travail. Ce qu’il ne retrouvera jamais, c’est la sérénité, la joie et les bénéfices de près de quatre années volées par la violation de la présomption d’innocence», a-t-il ajouté, regrettant que le Sénat ait «cédé» à «la pression médiatique» en suspendant son client, un haut fonctionnaire «sans histoire». Le Sénat a confirmé, de son côté, la réintégration du haut fonctionnaire.