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Libération
Editorial

Mikhaïl Gorbatchev, la liberté en héritage

Le dernier président de l’URSS s’est éteint mardi soir. Par sa volonté de transformation du communisme totalitaire et d’ouverture de son pays, il incarne des valeurs humanistes qui sont aujourd’hui encore attaquées en Russie et dans le monde.
Mikhaïl Gorbatchev. (Yousuf Karsh/CAMERA PRESS)
publié le 31 août 2022 à 21h18

Liberté. C’est sans hésitation le mot qui résume le mieux l’importance historique de Mikhaïl Gorbatchev, décédé mardi soir à 91 ans. Et c’est précisément parce qu’il a échoué dans sa tentative de transformer le communisme totalitaire soviétique qu’il faut célébrer sans sourciller aujourd’hui l’élan de liberté que le dernier leader de l’URSS a fait souffler sur son pays à l’époque. Cette liberté qui, en Russie aujourd’hui, est morte. Cette liberté encore fraîche que chérissaient les Ukrainiens, et qu’ils défendent aujourd’hui comme ils peuvent contre l’armée de Poutine. Cette liberté que redoute le président russe, et dont il prive aujourd’hui ses citoyens. Cette liberté qui, dans nos démocraties occidentales aussi, vacille ici où là. Cette liberté qui, pour résumer, reste un combat.

Il n’est donc pas l’heure de mégoter sur l’hommage à rendre à cet homme de paix, sans doute dépassé par son propre destin, mais qui, sans pouvoir renoncer au communisme de son grand-père ou de son père, avait compris l’impasse totalitaire du système dont il était devenu le premier représentant. On parle là de la liberté de manifester, de créer, de voyager, de s’opposer, de la liberté de la presse, de la liberté d’entreprendre aussi, de ces libertés individuelles qui se cachaient derrière les politiques de transformation profonde mises en œuvre via la glasnost et la perestroïka. Bien sûr, l’analyse de l’héritage laissé par cet humaniste communiste bute sur cet immense paradoxe qu’il aura bouleversé le monde sans avoir réussi à transformer son pays. Mais qui serions-nous pour juger des raisons de cet échec face à l’ampleur des événements planétaires que Gorbatchev a provoqués ? Surtout, comment ne pas adhérer à sa conviction qu’aucun avenir durable ne peut s’écrire sans ce mot, «liberté». Cet héritage-là ne se coupe pas en tranches, il se défend d’un bloc.