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Libération
Récit

Mon 11 Septembre, la fin de la fin de l’Histoire

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Les attentats du 11 Septembre 2001 aux Etats-Unisdossier
Aujourd’hui journaliste à «Libération», Eve Szeftel était à New York, le 11 Septembre, jeune reporter débutante au bureau de France 2. Elle raconte.
Eve Szeftel a vécu le 11 Septembre comme stagiaire au bureau de l'AFP de New York. (Chang W.Lee/NYT/REDUX/REA)
publié le 10 septembre 2021 à 22h22

J’ai 22 ans et je suis stagiaire au bureau de France 2 à New York. Après mes études, j’ai choisi de ne pas faire d’école de journalisme, mais de me former sur le terrain, à l’ancienne. Je vais être rapidement servie.

Le stage commence mal. L’été 2001 est d’un ennui mortel. Je m’occupe en classant des dépêches AFP, tout en suivant d’un œil distrait les news à la télé américaine. Des tensions avec la Chine beaucoup trop abstraites, une sous-affaire Monica Lewinsky qui peine à intéresser la presse internationale, et c’est tout. A New York, l’actualité est dominée par l’éclatement de la bulle internet. «Dot com, dot gone» : la concision des headlines de la presse américaine, dont je peine encore parfois à comprendre le sens. Aux Etats-Unis, quand un malheur arrive, cela se voit tout de suite : les rues autour d’Union Square sont couvertes de pancartes signalant des bureaux à louer.

Un souvenir marquant, cependant : la rencontre avec la sculptrice Louise Bourgeois, chez elle à Manhattan. Elle est alors âgée de 89 ans. Ses araignées géantes, «Maman and spiders», sont exposées tout l’été au Rockefeller Center. La plus grande, dressée sur ses hautes pattes fragiles de 10 mètres, c’est «Maman». Maman protège, maman menace, l’œuvre arachnéenne de la Française exprime tout cela à la fois. Les araignées sont démontées le 4 septembre. Une semaine avant.

«Ben Laden, c’est à peine si le nom m’évoque quelque chose»

Ce matin-là, il fait un temps splendide. Deux jours avant, j’ai voulu monter au sommet de la tour sud, mais le