Sur les photos de sa libération, les couleurs font presque oublier ce qu’elle vient de vivre. Tunique verte, sac bleu à pois blancs et surtout, grand sourire aux lèvres. Otage du Hamas pendant plus de six semaines, Ruth Munder est l’une des premières à témoigner en personne, décrivant ses conditions de captivité à la télévision israélienne.
Au début, «tout allait bien», a-t-elle raconté à la chaîne Channel 13, interview dont l’agence de presse américaine Associated Press a fait une recension mardi 28 novembre. Le matin, on leur servait du thé mais Ruth Munder se réveillait tard pour faire passer le temps. Des friandises étaient distribuées aux enfants. La journée, on leur donnait à tous «du poulet avec du riz, toutes sortes de conserves et du fromage». Et pour la soirée, encore du thé.
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Lors de l’attaque du Hamas le 7 octobre, Ruth Munder a été kidnappée à son domicile de Nir Oz, un kibboutz du sud d’Israël en même temps que sa fille, Keren, et son petit-fils Ohad, qui a fêté son neuvième anniversaire en captivité. Ruth et Keren ont appris la mort de leur fils et frère en détention par la radio qu’un membre du Hamas écoutait. Le père, Abraham Munder, est toujours otage du Hamas.
«J’étais optimiste»
Amaigrie, Ruth Munder, 78 ans, est revenue en relativement bonne condition physique, selon les premiers bulletins de santé communiqués par les autorités israéliennes. Confirmant les récits de parents d’autres otages, elle a raconté qu’ils devaient dormir sur des chaises en plastique (elle avait un drap, ce qui n’était pas le cas de tout le monde) et que certains enfants dormaient sur des nattes à même le sol. Selon cette grand-mère, les garçons qui étaient là discutaient jusque tard dans la nuit. Parfois certains enfants pleuraient.
La nourriture a drastiquement changé lorsque «la situation économique n’était pas bonne et que les gens avaient faim», une détérioration due en partie au blocus d’Israël sur Gaza, qui a entraîné des pénuries de vivres, de carburant et d’autres produits de base.
Contrairement à d’autres otages qui ont raconté avoir été détenus dans les tunnels du Hamas sous Gaza, Ruth Munder a vécu avec d’autres dans une pièce qui était «suffocante» et les otages, qu’elle n’a pas nommés, ne pouvaient pas ouvrir les stores mais elle a réussi à ouvrir une fenêtre. «C’était très difficile», a-t-elle expliqué, mais l’espoir, elle l’a toujours gardé : «J’étais optimiste. Lorsque nous sommes arrivés à Gaza, j’ai su que nous serions libérés un jour.»
Dans une interview télévisée dimanche, la cousine de Keren Munder, Merav Mor Raviv, a expliqué que leurs gardes étaient armés mais avaient le visage découvert et non cagoulé. «C’était effrayant, ils n’arrêtaient pas de leur faire ça», a-t-elle décrit, le pouce sur le cou pour mimer un égorgement. «Ils n’ont pas été torturés ou maltraités, mais certains jours, ils n’avaient rien à manger et il fallait parfois attendre entre une heure et demie et deux heures entre le moment où ils demandaient à aller aux toilettes et le moment où on le leur permettait», a-elle encore témoigné.
Epreuve physique et psychologique
Depuis leur retour, que les autorités israéliennes ont très strictement encadré d’un point de vue médical et médiatique, les otages libérés se sont pour la plupart tenus à l’écart de la scène publique. Le récit de Ruth Munder survient au moment où Israël et le Hamas ont accepté de prolonger leur trêve. Les échanges d’otages contre des prisonniers vont donc se poursuivre au moins jusqu’à jeudi.
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Tous les otages libérés jusqu’à maintenant ont suivi des tests physiques et psychologiques dans les six hôpitaux israéliens mobilisés pour les recevoir avant de rentrer chez eux. A côté du rétablissement physique, il va falloir beaucoup de temps pour se remettre psychologiquement de ce qu’ils ont vécu. Le personnel médical a entendu «des histoires très difficiles et complexes sur le temps passé en captivité avec le Hamas, a déclaré Itai Pessach, directeur de l’hôpital pour enfants Edmond et Lily Safra. Il y a un très, très long chemin à parcourir avant qu’ils ne soient guéris».