Une fois passé le barrage qui marque l’entrée d’un quartier cossu de Savyon, dans la grande banlieue de Tel-Aviv, c’est une foule silencieuse qui se présente. Avec de grands drapeaux d’Israël, des voitures garées dans tous les sens, devant de grandes villas, sur un bout de trottoir, ou carrément sur les voies. Une foule de chemises blanches marquées d’une étoile de David rouge. Quelques tenues kaki aussi. Et parfois un fusil en bandoulière. C’est que Yarin Peled faisait à la fois partie de l’armée israélienne et de Maguen David Adom, l’équivalent de la Croix-Rouge dans l’Etat hébreu. Et pour son enterrement, où l’on se fraie un chemin entre les tombes derrière la masse immobile de l’assistance trop nombreuse, elle avait souhaité que tous ses camarades viennent en uniforme.
C’est tôt, 20 ans, pour avoir déjà un testament. Alom pousse un soupir d’approbation. Puis cet oncle tout en tenue, aux grands yeux bleus comme sa nièce, se reprend : «Quand on est militaire, on sait qu’on peut mourir.» Ça n’empêche pas les larmes, qui brillent sous les képis, ni celles qui coulent sur les épaulettes. Il faut dire que l’assistance n’est pas vieille. Une myriade de visages poupins. Ils ont l’air fiers et durs jusqu’à ce qu’ils n’en puissent plus. Que les discours qui s’enchaînent leur tordent l’estomac. Jusqu’à ce que leur mine se crispe, que leurs yeux tombent et que leur menton tremblote. Yarin était dans la médecine militaire, c’était une soldate «tuée au combat», mai