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Témoignage

Ariel Bernstein, ex-soldat de Tsahal : «Entrer à Gaza est une des choses les plus effrayantes que j’aie vécues»

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Guerre au Proche-Orientdossier
En 2014, alors qu’il faisait son service militaire, Ariel Bernstein, 29 ans, a été envoyé dans l’enclave palestinienne avec son unité. Aujourd’hui militant pour la paix, il redoute les conséquences d’une inéluctable offensive terrestre.
L’ancien soldat israélien Ariel Bernstein à Tel-Aviv, dimanche 22 octobre. (Rafael Yaghobzadeh/Libération)
par Nicolas Rouger, correspondant à Tel-Aviv
publié le 22 octobre 2023 à 21h05

«J’ai fait mon service militaire dans une unité d’élite de reconnaissance de la brigade Nahal, entre 2012 et 2015. Nous étions déployés en Cisjordanie, mais quand l’offensive [de 2014] a été déclarée, on nous a donné une nouvelle mission : entrer dans Beit Hanoun [dans le nord-est de la bande de Gaza]. Nous devions sécuriser le quartier pendant qu’un groupe de sapeurs s’occupait de détruire des tunnels du Hamas. Il n’y avait pas d’autre choix que d’y aller à pied.

«Avant l’offensive, beaucoup de généraux et de politiciens sont venus nous rendre visite pour regonfler le moral des troupes. J’avais déjà commencé à perdre de ma motivation en tant que soldat, à remettre en question ce que nous faisions en Cisjordanie. Mais je ne pensais qu’à mes potes, j’y allais pour eux, pour les mecs de mon unité. Et puis Gaza, c’était plus simple moralement – en fin de compte, c’est une guerre, une vraie, avec de vrais adversaires.

«Rentrer dans la bande est une des choses les plus stressantes, les plus effrayantes que j’aie vécues. Tout ce qu’on sait de l’autre côté, c’est ce qu’on a vu à la télé. Tu sens qu’on veut t’attirer dans un piège, un environnement urbain très dense, où l’avantage d’une grande armée, puissante, devient nul.

«Nous sommes restés pendant deux semaines à Beit Hanoun ; nous ne sommes sortis qu’une fois, pour quelques heures. Tous les soirs, on dormait dans un appartement différent, en fonction de la mission qu’on devait accomplir. Tu vois les traces d’humanité