«Etat français terroriste, Macron est un assassin d’enfants palestiniens», en lettres rouges, des partisans du Hamas ont inscrit des slogans sur le parvis de l’ambassade de France au Liban. Dans le parterre réuni en fin de matinée à Beyrouth, les fanions du PSNS (parti pro-syrien), côtoient les étendards du Fatah ou du Jihad islamique, mais surtout ceux du Hamas, présents en nombre. Dans la nuit du 17 octobre, ses militants avaient déjà pris pour cible les lieux en y jetant des pierres, poussant l’ambassade à réagir et à rapatrier une partie de son personnel non essentiel.
Arrivé dans un vieux bus cabossé affrété par le mouvement islamiste, Ahmad, 18 ans, les traits encore juvéniles, porte un drapeau blanc flambant neuf, floqué de l’insigne des brigades al-Qassam. «Sans doute le Hamas fait des actions terroristes, mais nous rendons la pareille à l’ennemi israélien, qui mène lui aussi des actions terroristes contre les civils de Gaza», s’exclame-t-il, dos à la foule. A quelques mètres de là, plusieurs leaders du Hamas au Liban s’en prennent nommément à la diplomatie française. «La France fait semblant d’être la patrie des droits de l’homme, mais soutient aveuglément Israël. Dans leur propre pays, ils interdisent même les manifestations en soutien au peuple palestinien !» hurle au micro Ahmad Abed El Hadi, l’un d’entre eux.
Fait curieux, la manifestation a été lancée à l’appel du Hezbollah mais aucun drapeau jaune vif de la milice chiite n’est brandi dans la foule des sympathisants. Depuis plusieurs jours, alors que la fréquence des tirs d’artillerie s’accélère à la frontière libano-israélienne, la milice chiite laisse de plus en plus ses alliés le Hamas ou le Jihad islamique revendiquer des attaques. En laissant également ces factions palestiniennes manifester seules à Beyrouth, le Hezbollah complique l’équation, et menace de lâcher les rênes de ses alliés palestiniens.
«L’escalade se fait à petits pas»
Du côté de la chancellerie française, la situation inquiète. «La séquence commence à durer. L’escalade se fait à petits pas, mais elle pourrait déraper et devenir hors de contrôle», dit une source diplomatique proche du dossier. L’influence française, décroissante au pays du Cèdre, peine à peser pour une désescalade. «Le gros du travail se passe du côté de la bande de Gaza. La situation se calmera quand les Américains arriveront à faire croire aux Israéliens qu’ils ont gagné d’une manière ou d’une autre. Pour le Liban, la solution se trouve du côté des institutions. Pour calmer la situation, il faut que la branche politique d’un acteur comme le Hezbollah prenne le poids sur sa branche militaire», ajoute cette même source diplomatique.
Cependant, la milice chiite demeure hégémonique dans un Liban failli, sans président depuis exactement un an. Le Hezbollah a son destin lié à celui du Hamas. Ses cadres craignent que si leur allié disparaît de la bande de Gaza, le sud du Liban devienne un front prioritaire pour Israël. Le Hezbollah n’aimerait pas devenir l’ennemi numéro 1 de l’Etat hébreu. Alors les hommes du Hamas réunis devant l’ambassade de France relaient la menace : «Si Israël est décidé à détruire le Hamas, ils doivent s’attendre à ce que le Hezbollah aille les détruire.»